Adoption par le Sénat du projet de loi sur le logement social

Adoption par le Sénat du projet de loi sur le logement social

Le projet de loi présenté en Conseil des ministres le 5 septembre 2012 relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social a été adopté le 13 septembre par le Sénat.

1. Les 3 principaux apports du projet de loi en matière de logements sociaux concernent :

– la cession du foncier public de l’Etat aux collectivités locales avec une forte décote pouvant aller jusqu’à la gratuité (décote de 100% de la valeur vénale) ;

– l’augmentation du seuil minimal de logements sociaux de 20 à 25% prévu à l’article 55 de la loi SRU, à l’exception des communes appartenant à une agglomération ou à un EPCI à fiscalité propre dont le parc de logements sociaux existant ne justifie pas un effort de production de logements sociaux supplémentaires ;

– le renforcement des pénalités pouvant être appliquées aux communes faisant l’objet d’un constat de carence multipliant jusqu’à 5 le montant des prélèvements.

2. Le Sénat renforce le caractère social du projet de loi et clarifie le financement de la mesure :

– la logique de la décote du prix des terrains est inversée : alors que le projet de loi prévoyait que la décote consentie par l’Etat pouvait atteindre 100%, les sénateurs prévoient que la décote « est fixée à 100% de la valeur vénale du terrain » et qu’elle peut être réduite selon la catégorie des logements et des circonstances locales (situation du marché foncier …) ;

– les sénateurs ont intégré les modalités de la compensation des pertes de recette pour l’Etat en prévoyant la mise en place d’une taxe additionnelle sur le tabac et les cigarettes ;

– ils ont également élargi la liste des bénéficiaires de la décote aux opérateurs liés à une collectivité ou un EPCI à fiscalité propre par une concession d’aménagement dont l’objet prévoit la construction de logements sociaux ;

– ils ont prévu que la non-réalisation du programme de logements sociaux sur les terrains cédés par l’Etat après décote dans un délai de 5 ans entraine la résolution de la vente sans indemnité pour l’acquéreur (délai suspendu en cas de recours devant les juridictions administratives et en présence de prescriptions de fouilles archéologiques).

3. Ce texte, qui affecte de nombreuses réglementations périphériques, doit être revu par l’Assemblée nationale qui ne devrait pas manquer de reprendre et prolonger plusieurs débats.

Parmi ceux-ci, il y a notamment la question complexe de l’étendue des bénéficiaires de la décote au-delà des seules collectivités publiques locales.

En effet, dès lors que la Loi prévoit l’obligation de répercuter la décote sur le prix de cession du foncier sur l’opération immobilière, on peut s’interroger sur la pertinence et la légalité de l’avantage donné, à ce stade, à certains opérateurs privés.

Car, il est indéniable qu’un opérateur privé privilégié, seulement à raison de ses liens particuliers avec une collectivité publique, va pouvoir, par cet avantage, accroitre son volume d’activités en disposant d’un foncier supplémentaire.

Or, l’on peut s’interroger sur les justifications d’un tel avantage. Dès lors qu’un opérateur privé, n’ayant aucun lien privilégié avec une collectivité publique, réalise également du logement social et qu’il est soumis, par la loi, à l’obligation de répercuter la décote obtenue sur le prix d’acquisition du terrain, on ne voit pas réellement ce qui justifie qu’il ne puisse pas avoir également accès au terrain dans les mêmes conditions que les opérateurs ayant un lien avec une collectivité publique …

A défaut de faire l’objet de précisions par l’Assemblée nationale, l’extension à certains opérateurs du bénéfice de la décote de la valeur des terrains, inséré par un amendement sénatorial en vue de prévenir les « double mutation, synonyme de coûts supplémentaires et d’allongement des délais », pourrait susciter à termes des questions complexes et susceptibles d’affecter certaines opérations.

Ombeline Soulier Dugénie

Avocat à la Cour

Alexandre Le Mière

Avocat associé

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