Annulation du dispositif d’encadrement des loyers à Lille : une victoire en demi-teinte pour les propriétaires et les professionnels de l’immobilier

Annulation du dispositif d’encadrement des loyers à Lille : une victoire en demi-teinte pour les propriétaires et les professionnels de l’immobilier.

Par un jugement du 17 octobre 2017 (TA de Lille, Chambre FNAIM de l’immobilier du Nord et autres, req. n°1610304), le tribunal administratif de Lille a annulé l’arrêté du préfet du Nord du 16 décembre 2016 fixant le dispositif d’encadrement des loyers à Lille.

Pour autant, le tribunal administratif ne sanctionne pas le principe de l’encadrement des loyers mais seulement les modalités de mise en œuvre par le Préfet.

En effet, le tribunal administratif censure le périmètre retenu pour l’application du dispositif d’encadrement des loyers, limité au seul territoire de la Commune de Lille alors qu’il aurait dû, conformément aux textes légaux et réglementaires, s’appliquer sur toute l’agglomération lilloise, laquelle comprend 58 autres communes. 

Le tribunal administratif de Lille annule donc purement et simplement l’arrêté du Préfet du Nord, sans en différer les effets de l’annulation[1] (il n’est pas certain que le préfet en ait fait la demande).

Eu égard aux motifs de l’annulation retenus par le tribunal administratif, il est très probable que le Préfet du Nord, sans attendre un éventuel dénouement judiciaire en appel, décide d’ores et déjà de reprendre un nouvel arrêté de fixation des loyers étendu à toutes les communes de l’agglomération de Lille.

Relevons enfin que le tribunal administratif a jugé que seul l’UNPI Nord de France justifiait d’un intérêt à agir, rejetant pour irrecevabilité les requêtes de l’Union des Syndicats de l’Immobilier (UNIS) et de la Chambre FNAIM de l’immobilier du Nord.

Cette différence d’appréciation de l’intérêt à agir résulte du fait que, contrairement à l’UNPI Nord de France, l’UNIS et la FNAIM ne défendent pas les intérêts des propriétaires de logements susceptibles de faire l’objet d’un bail locatif mais les intérêts des professionnels de l’immobilier :

« qu’eu égard aux effets pécuniaires susceptibles de découler de l’arrêté en litige pour, notamment, les propriétaires de logements à même d’être mis à bail sur le territoire de la commune de Lille, cette organisation doit être regardée comme justifiant d’un intérêt suffisant pour agir contre l’arrêté en litige du préfet du Nord. »

Il semblerait également que le tribunal administratif de Lille n’ait pas identifié, dans les statuts des de l’UNIS et de la FNAIM, de lien entre les intérêts qu’ils défendent et l’objet de l’arrêté attaqué.

[1] « (…) s’il apparaît que cet effet rétroactif de l’annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu’il était en vigueur que de l’intérêt général pouvant s’attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif – après avoir recueilli sur ce point les observations des parties et examiné l’ensemble des moyens, d’ordre public ou invoqués devant lui, pouvant affecter la légalité de l’acte en cause – de prendre en considération, d’une part, les conséquences de la rétroactivité de l’annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d’autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l’annulation ; ; qu’il lui revient d’apprécier, en rapprochant ces éléments, s’ils peuvent justifier qu’il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l’effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l’affirmative, de prévoir dans sa décision d’annulation que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de celle-ci contre les actes pris sur le fondement de l’acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l’annulation ne prendra effet qu’à une date ultérieure qu’il détermine ; » (CE 17 février 2010, SFIB, Assoc. UFC Que Choisir et autres et SA Rue du Commerce, req. nos 310195 et a. ; voir également CE, Ass., 11 mai 2004, Association AC ! et autres, req. n° 255886).

 

Ombeline Soulier-Dugénie
Avocate Associée

 

Lien vers le jugement voir jugement n° 1610304

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