Un salarié est obligé de rendre ses actions en cas de licenciement
Il n’est pas rare que la clause d’un pacte d’actionnaires, signé entre le salarié et la société, prévoit que le salarié s’oblige à céder à un prix décoté ses actions de la société au cas où il viendrait à en être licencié.
La Cour de cassation vient de valider ce schéma, dans un arrêt important (Cass. com., 7 juin 2016, n° 14-17.978, n° 543 FS-P+B).
Les faits :
Une société attribue gratuitement un certain nombre de ses actions à l’une de ses salariées.
Un pacte d’actionnaires est conclu entre cette salariée et la société mère de son employeur, dans lequel la salariée de la filiale promet irrévocablement de céder la totalité de ses actions au cas où elle viendrait, pour quelque cause que ce soit, à ne plus être salariée de cet employeur.
Ce même pacte précise que les modalités de fixation du prix de cession varieront selon les circonstances dans lesquelles le contrat de travail prendra fin : en cas de cessation du contrat de travail pour cause de licenciement, autre que pour faute grave ou lourde, il est stipulé que le prix de cession des actions sera fixé à la moitié de celui déterminé par un expert.
Quelques années plus tard, la salariée est licenciée sans cause réelle et sérieuse. Pour contester l’application de la décote de 50 % par rapport au prix fixé par l’expert, la salariée invoque divers arguments qui sont tous rejetés. Il est jugé que la clause de décote est valable.
La clause est licite :
Les juges observent que la clause prévoyant cette décote de la valeur des actions en cas de licenciement participe à l’équilibre général du contrat, s’inscrit dans un processus d’amélioration de la rémunération de l’intéressée, d’association à la gestion et d’intéressement au développement de la valeur de l’entreprise, en contrepartie de son activité au profit de cette entreprise. Ils en déduisent que la cause de cette disposition n’est pas illicite.
La Cour de cassation retient que la clause litigieuse s’applique dans toutes les hypothèses de licenciement, autres que disciplinaire. En cela, elle ne vise pas à sanctionner un agissement de la salariée considéré par l’employeur comme fautif. Dès lors, elle ne constitue pas une sanction pécuniaire prohibée.
La salarié licenciée soutenait que seul le lien de subordination dans lequel elle était vis-à-vis de son employeur l’avait amenée à accepter un prix de ses actions largement dégradé en cas de licenciement. Ce lien de subordination, lui ayant interdit de négocier librement les clauses du pacte d’actionnaires, aurait vicié son consentement. Ce moyen, n’ayant pas été soutenu devant la Cour d’appel, était nouveau et a donc été rejeté.
En conclusion : la clause du pacte d’actionnaires, signé entre un employeur et son salarié, prévoyant la cession obligatoire, à un prix décoté, des actions de ce dernier en cas de licenciement est valable.
Benjamin Louzier
Avocat Associé