Domaine public : les conséquences de la conclusion d’un bail commercial sur le domaine public et la responsabilité de la personne publique

Domaine public : les conséquences de la conclusion d’un bail commercial sur le domaine public et la responsabilité de la personne publique

1- L’occupation du domaine public relève d’un régime spécifique fixé par le Code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) excluant, notamment, l’application des règles du droit du bail commercial (art. L.145 et s. du Code de commerce).

Il arrive cependant que le gestionnaire du domaine public et l’occupant concluent un contrat dont les mentions sont celles du bail commercial. La conclusion d’un « bail commercial » sur le domaine public est ainsi irrégulière.

2- En cas de difficultés imputables à la conclusion irrégulière du bail commercial, l’occupant peut rechercher la responsabilité de la personne publique gestionnaire du domaine public en raison de la faute commise par cette dernière en permettant la signature d’un tel bail.

Les conséquences de la conclusion d’un bail commercial sur le domaine public peuvent en effet être radicales et catastrophiques pour un opérateur économique.

Ce dernier peut, par exemple, perdre son droit à l’occupation de façon presque immédiate sans avoir la possibilité de poursuivre son activité ailleurs ou encore sans avoir été en capacité d’amortir les investissements qu’il avait engagé pour l’exercice de son activité (voir en ce sens : CAA Marseille, 16 décembre 2014, Société Papazian, req. n° 12MA00338).

3- Cependant, les conditions d’engagement de la responsabilité de la personne publique gestionnaire du domaine sont, en la matière, drastiques.

Ainsi, dans une affaire récente (CE, 2 novembre 2015, SARL Papazian, req. n° 389637), le Conseil d’Etat a suspendu la décision de la Cour administrative d’appel de Marseille (précitée) qui avait fait droit aux conclusions indemnitaires d’un occupant du domaine public, titulaire d’un bail commercial, que la Commune gestionnaire du domaine avait résilié.

Pour suspendre la décision d’appel, le Conseil d’Etat a (par une décision non définitive) considéré que cette dernière n’aurait pas pris en compte la responsabilité de la SARL Papazian occupante. Le Conseil d’Etat considère que ladite société ne pouvait ignorer l’appartenance au domaine public du bien occupé et, partant, le régime juridique qui lui était applicable excluant le droit des baux commerciaux. En bref, le Conseil d’Etat estime qu’il est possible que la situation soit en tout ou partie imputable à la société occupante de sorte que la responsabilité de la Commune pourrait ne pas être engagée.

4- Il faut, naturellement, attendre la décision finale qui sera rendue prochainement par le Conseil d’Etat dans cette affaire.

Cette décision souligne néanmoins que toute activité commerciale sur le domaine public doit reposer sur des bases solides : il appartient donc aux opérateurs économiques, dès lors que leur activité est repose sur le domaine public ou est « touchée » ou « concernée » par le domaine public de s’assurer des règles applicables.

Les opérateurs économiques doivent en effet d’une part d’être parfaitement conscient de l’environnement juridique dans lequel ils évoluent ainsi que de sa portée et d’autre part de disposer des autorisations et/ou contrats propres à protéger leurs intérêts.

Alexandre Le Mière
Avocat associé

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