La compétence élargie des Préfets en matière de délivrance des autorisations d’urbanisme

La compétence élargie des Préfets en matière de délivrance des autorisations d’urbanisme (décret n° 2015-482 du 27 avril 2015 portant diverses mesures d’application de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové et relatif à certaines actualisations et corrections à apporter en matière d’application du droit des sols).

1- Le décret n° 2015-482 du 27 avril 2015 met en œuvre un certain nombre de dispositions de la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et poursuit la simplification du droit des sols. 

Parmi les mesures importantes, le préfet se voit transférer une nouvelle compétence : celle de délivrer les autorisations d’urbanisme (permis de construire, permis de démolir et permis d’aménager) des constructions à usage de logements situées dans les communes en état de carence au regard de leurs obligations issues de l’article 55 de la loi SRU en matière de création de logements sociaux.

A compter du 1er juillet 2015, il n’appartient donc plus aux maires des communes dont la carence a été constatée par arrêté du préfet, de délivrer ces autorisations.

Les préfets disposent ainsi d’un pouvoir de contrainte directe sur les communes qui ne respectent pas leur obligation de constructions de logements sociaux.

Les promoteurs immobiliers doivent être vigilants et s’interroger très en amont, sur la faisabilité de leurs projets au regard des obligations pesant sur les communes de rattraper leur retard relatif à la construction de logements sociaux.

Il est préconisé que les promoteurs immobiliers vérifient très tôt si la commune a été déclarée en situation de carence en matière de construction de logements sociaux (la liste des communes carencées au titre du bilan SRU 2011-2013 est consultable sur http://www.territoires.gouv.fr/renforcement-de-la-loi-sru). Cette information peut aussi être sollicitée directement auprès du préfet.

Si la commune fait l’objet d’un constat de carence, le projet de construction devra dédier une partie de ses logements à la création de logements sociaux.

Si la commune ne fait pas l’objet d’un constat de carence, la création de logements sociaux ne sera pas une obligation.

En outre, les promoteurs devront prendre soin d’adresser leur demande d’autorisation d’urbanisme à l’autorité compétente, soit le préfet en cas de carence de la commune, soit au maire.

Toute autorisation délivrée par une autorité compétente est en effet illégale et encourt l’annulation pour ce seul motif.

2- Autre disposition marquante, le décret interdit explicitement à l’autorité délivrant les autorisations d’urbanisme, de solliciter, au stade de l’instruction, des pièces non prévues par les textes.

Est ainsi inséré à l’article R.431-4 b) du code de l’urbanisme l’alinéa suivant:

« Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l’autorité compétente. »

Si cette disposition peut paraître évidente pour les praticiens du droit de l’urbanisme, ce rappel répond cependant à une pratique de plus en plus constatée de certains services instructeurs, visant à solliciter la communication de pièces complémentaires non requises par les textes et ainsi allonger la durée des délais d’instruction.

De tels procédés sont illégaux et contraires à la finalité de la loi ALUR dès lors qu’ils ralentissent, voire font obstacle, à la délivrance des permis de construire.

L’Etat manifeste donc ici clairement son intention d’y mettre un terme.

Le décret est d’ailleurs précisément justifié en ce sens :

« Enfin et afin de combattre les pratiques dilatoires et illégales consistant pour certains services instructeurs à demander des pièces qui ne figurent pas au nombre de celles qui doivent entrer dans le contenu d’une demande d’autorisation d’urbanisme, le décret interdit expressément toute pratique en ce sens. » (http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000030533994&categorieLien=id)

Relevons que ces pratiques dilatoires émanant de certains services instructeurs ont déjà été fortement soulignées et décrites dans le récent rapport Duport publié le 4 avril 2015. (http://www.territoires.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_duport.pdf)

Ce rapport – qui devrait aboutir à de nouvelles réformes du droit et du contentieux de l’urbanisme – relate en effet certaines pratiques dilatoires des communes pour retarder ou refuser la délivrance des autorisations d’urbanisme.

Une des solutions envisagées pour y remédier avait été de substituer les préfets aux maires qui refuseraient de délivrer les permis de construire pour des motifs illégaux. Cependant, le rapport Duport s’est finalement prononcé en faveur de l’intervention du juge administratif qui pourrait enjoindre le maire, après 2 refus illégaux, à délivrer ledit permis (ce qu’il ne peut pas faire à ce jour, le juge ayant seulement la possibilité d’enjoindre à reprendre l’instruction de la demande).

Lien décret : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000030533994&categorieLien=id

Lien rapport Duport : http://www.territoires.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_duport.pdf

Ombeline Soulier-Dugénie
Avocat à la Cour

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