Licenciement pour inaptitude : le juge administratif persiste à imposer une obligation de formation

Licenciement pour inaptitude : le juge administratif persiste à imposer une obligation de formation

1. Le salarié protégé licencié pour inaptitude doit faire l’objet d’une recherche de reclassement au sein de l’entreprise en fonction de l’avis donné par le médecin du travail.

Cependant, alors même que l’avis du médecin du travail s’impose à l’entreprise, le juge administratif considère pour sa part que l’employeur ne peut pas réellement s’y fier.

Il est en effet de plus en plus fréquent qu’alors même que le médecin du travail déclare le salarié « inapte à tout emploi dans l’entreprise » le juge administratif oblige l’employeur à chercher des solutions de reclassement au sein de l’entreprise. L’employeur se retrouve ainsi dans la situation de devoir démontrer ce que le médecin a décrété sur la base d’un examen médical …

2. Le juge administratif n’ignorant pas la complexité, voire l’absurdité, de sa position trouve la raison de sanctionner l’employeur dans une obligation de formation du salarié protégé en procédant à une lecture plus qu’extensive de la loi.

En effet, si l’employeur a l’obligation de rechercher toute possibilité de reclassement dans l’entreprise ou au sein du groupe, « au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail » (art. L.1226-2 C. Trav.), il n’a aucune obligation de formation.

Pourtant, on constate de plus en plus fréquemment que le juge administratif reproche à l’employeur de ne pas démontrer avoir mis en oeuvre une formation afin de pallier l’inaptitude du salarié qui lui aurait permis d’être reclassé sur un poste (voir pour un exemple récent : CAA Nantes, 27 septembre 2012, Vos Logistics Bretagne, req. n° 11NT02417).

3. Outre qu’elle n’est pas conforme au droit, la position du juge administratif apparait de surcroît à contre-courant de la jurisprudence de la Cour de cassation qui, désormais, sanctionne le « mauvais » reclassement du salarié.

En effet, la Cour de cassation a récemment reproché à un employeur d’avoir reclassé un salarié après lui avoir proposé une formation, laquelle a été jugée inappropriée aux compétences et capacités réelles du salarié (Cass. Soc., 7 mars 2012, n° 11-11311).

L’employeur se retrouve ainsi dans la situation invraisemblable où, bien que la loi ne l’y oblige pas, le juge estime qu’il doit mettre en oeuvre une formation pour lui permettre de le reclasser sur un poste disponible dans l’entreprise. Mais, parallèlement, s’il s’avère que, malgré cette formation, le salarié est en situation d’échec sur le poste, il pourra le reprocher à son employeur …

4. La suspicion que nourrie le juge administratif à l’égard de l’employeur du salarié protégé ne peut qu’inciter ce dernier à une vigilance accrue et particulièrement attentive lorsqu’il doit le licencier. La procédure et les démarches à mettre en oeuvre doivent être précisément organisées et rationnalisées pour tenter d’obtenir la validation de l’autorisation de licenciement.

Alexandre Le Mière

Avocat associé

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