Quelques précisions sur les informations d’identification à conserver par les prestataires d’hébergement

Quelques précisions sur les informations d’identification à conserver par les prestataires d’hébergement

Deux décisions rendues le même jour, l’une par le Président du Tribunal de Grande Instance de Paris statuant en référé, l’autre par la Cour d’appel de Paris, concernant toutes deux la société YouTube, sont venues éclaircir les règles relatives aux données d’identification des internautes que les prestataires d’hébergement se doivent de conserver et, le cas échéant, mettre à la disposition de la justice ou des titulaires de droit en cas de litige (par exemple lorsqu’un internaute diffuse une vidéo protégée par des droits d’auteur sur un site de partage).

La loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004 (LCEN) dispose à son article 6-II que les hébergeurs doivent détenir et conserver les données de nature à permettre l’identification de quiconque à contribué à la création du contenu ou de l’un des contenus des services dont ils sont prestataires. La liste de ces données doit, en application de cette loi, être fixée par un décret pris en Conseil d’Etat. Or le gouvernement a pris du retard dans les mesures d’application de la LCEN, tant et si bien qu’à ce jour, ce texte n’a toujours pas été adopté.

Dans ce silence, quelles sont donc les informations que les prestataires d’hébergement doivent conserver à propos des internautes qui utilisent leurs services ?

Le 14 novembre 2008, le Tribunal de Grande Instance de Paris avait considéré qu' »à tout le moins dans l’attente du décret d’application non encore paru, [la société YouTube] devait collecter les données de nature à permettre l’identification des internautes éditeurs sur son site, telles qu’expressément et clairement définies par la loi, à savoir leurs nom, prénoms, domicile et numéro de téléphone ».

Cependant, les données définies par la loi et visées par ce jugement sont celles relatives aux « personnes physiques dont l’activité est d’éditer un service de communication au public en ligne » (article 6-III-1 de la LCEN). Concrètement, ce sont les personnes physiques qui éditent leur propre site Internet. Cette définition ne s’applique pas parfaitement aux internautes qui ne font que participer à un site communautaire en envoyant des vidéos, par exemple.

L’obligation faite aux prestataires d’hébergement de collecter des données telles que le nom, le prénom ou encore le numéro de téléphone pouvait donc paraître quelque peu excessive.

C’est pourquoi le 7 janvier dernier, le Président du Tribunal de Grande Instance de Paris et la Cour d’appel de Paris ont décidé de limiter les informations d’identification devant être conservées aux seules adresses e-mails et adresses IP.

Selon l’arrêt de la Cour, « à ce jour, la loi n’impose pas aux hébergeurs de détenir [les adresses et numéros de téléphones des internautes] et en détenant et conservant l’adresse e-mail ainsi que l’adresse IP des éditeurs qui sont de nature à permettre leur identification, la société YouTube remplit l’obligation que lui impose l’article 6-II de la LCEN ».

L’ordonnance de référé, pour sa part, se réfère très opportunément au projet de décret : « il n’apparaît pas, au demeurant, que le projet de décret fasse obligation à l’hébergeur de collecter les noms, prénoms, adresses et numéros de téléphone de l’éditeur du contenu ».

Cette solution reste raisonnable dans la mesure où il est toujours possible, avec l’adresse IP et une adresse e-mail, de parvenir non seulement à identifier – indirectement – un internaute, mais également de lui adresser une lettre de mise en demeure par courrier électronique, et donc de le toucher de manière rapide et efficiente.

Matthieu Berguig

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