Sanctions administratives : contrôle et sanction par l’administration du respect du droit de la consommation
- La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a mis en place un système de sanctions administratives dont la mise en œuvre a été confiée à l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation (cf. articles L.511-1 et suivants sur la recherche et la constatation d’infractions et articles L.521-1 et suivants sur les mesures pouvant être prises à l’occasion et à la suite des contrôles).
Il appartient ainsi à l’administration (généralement le service local de l’Etat dédié à la protection des populations [DDPP]) de contrôler l’activité et le comportement des opérateurs économiques vis-à-vis des consommateurs et, le cas échéant, de les sanctionner.
- Ainsi, à titre d’exemple, le code de la consommation oblige, notamment, à ce que tout prix supplémentaire facturé en sus du prix principal sur un contrat de vente ait reçu l’assentiment exprès du consommateur (cf. art. L.121-17 C. Conso., anc. art. L.114-1 C. Conso.).
Indépendamment de la réparation « personnelle » à laquelle le consommateur peut prétendre, l’opérateur économique est par ailleurs en en outre passible d’une amende administrative fixée par les dispositions de l’article L.132-22 C. Conso. (allant de 3.000 à 15.000 € – anc. art. L.114-2 C. Conso.).
L’amende administrative est prononcée par l’autorité administrative dans les conditions prévues aux articles L.522-1 et suivants du Code de la consommation. Celles-ci organisent une procédure « complète » en fixant des délais de prescription et en obligeant à tenir une procédure contradictoire entre l’administration et l’opérateur économique ; elle ouvre également la possibilité de transiger avec l’administration (art. L.523-1 et s. C. Conso.).
L’ensemble de la procédure et de la sanction infligée est contrôlé par le juge administratif qui peut être saisi par les opérateurs économiques : ces derniers peuvent en effet contester devant le juge administratif les décisions de contrôle et de sanction prises par l’autorité administrative.
- Ce processus, récent, et dont la mise en œuvre commence à se faire ressentir par les opérateurs économiques, ouvre de nouvelles questions juridiques.
Ainsi, une société (de conseil en voyages) a récemment fait l’objet d’une décision prise par le directeur départemental de la protection des populations de Pa ris. Cette société s’est vue infligée une amende « pour manquement à l’article L.114-1 du code de la consommation » (article désormais numéroté L.121-17).
A l’occasion de la contestation de cette décision, la société a notamment tenté de faire valoir que les dispositions de l’article L.114-2 du Code de la consommation (désormais renuméroté L.132-22) étaient imprécises (CE, 7 juin 2017, req. n° 408612). La société a opposé que le fait que l’article vise « tout manquement » sans autre précision n’était, selon elle, pas conforme à l’exigence constitutionnelle de clarté et de précision requis en matière de délits et de peines (conformément aux principes posées par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen) et à solliciter du Conseil d’Etat qu’il soumette le sujet au Conseil constitutionnel.
Le Conseil d’Etat, après avoir rappelé qu’en matière de sanction administrative, la loi et le règlement qui fixent les sanctions peuvent se borner à renvoyer et à se référer aux dispositions qui définissent les obligations s’imposant à l’opérateur économique, indique qu’en l’espèce, s’agissant du consentement exprès du consommateur à tout paiement supplémentaire, le texte (à savoir l’article ex. L.114-1, devenu L.121-17 C. Conso.) est suffisamment clair et précis. Il a donc rejeté la demande de renvoi au Conseil constitutionnel.
Cette (première) décision du Conseil d’Etat conduit à un constat simple : les marges de manœuvre dont l’administration dispose pour sanctionner un manquement sont, « en miroir », aussi large que les obligations qui s’imposent à l’opérateur économique fixées par le Code de la consommation.
- Les opérateurs économiques doivent désormais impérativement intégrer dans leur quotidien le contrôle susceptible d’être exercé par l’administration sur le respect des obligations imposées par la loi au titre du droit de la consommation.
Il leur appartient de se former à cette nouvelle donne et d’apprendre à gérer autant sur le fond qu’au plan procédural l’incursion de l’administration dans leur activité et les contrôles auxquels elle peut procéder ainsi que les éventuelles sanctions qu’ils peuvent être amenés à subir.
Alexandre Le Mière
Avocat associé