Clause de non concurrence illicite : le salarié doit prouver son préjudice par des arguments et des pièces s’il souhaite obtenir une indemnisation

Clause de non concurrence illicite : le salarié doit prouver son préjudice par des arguments et des pièces s’il souhaite obtenir une indemnisation

La Cour de cassation (Cass. soc., 25 mai 2016, n° 14-20.578 F-PB) revient sur sa jurisprudence selon laquelle la présence, dans le contrat de travail, d’une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie pécuniaire cause « nécessairement » un préjudice au salarié.

Si ce dernier souhaite être indemnisé, il doit prouver son préjudice.

Depuis 2011, la Cour de cassation considérait que le seul fait d’insérer, dans le contrat de travail, une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie pécuniaire (c’est-à-dire une clause illicite atteinte de nullité), causait nécessairement un préjudice au salarié. Il pouvait donc obtenir réparations sans démontrer son préjudice.

Cette jurisprudence est désormais révolue. 
En l’espèce, un salarié avait notamment réclamé à son employeur 2 500 € de dommages-intérêts en raison de la présence, dans son contrat de travail, d’une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie pécuniaire.

La Cour d’appel a rejeté cette demande d’indemnisation car le salarié avait débuté une activité concurrente au sein d’une société qu’il avait constituée avec un ancien collègue. Aucun préjudice n’avait été causé à l’intéressé par la clause illicite puisqu’il n’avait pas même eu à respecter l’interdiction.

La clause a finalement été annulée pour défaut de contrepartie, mais sans octroi de dommages-intérêts.

La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel en rappelant que :

« l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond…la cour d’appel ayant constaté que le salarié n’avait subi aucun préjudice résultant de l’illicéité de la clause, le moyen ne peut être accueilli ».

Concrètement, le salarié doit apporter au juge tous les éléments démontrant l’existence du dommage qui en est résulté pour lui, ce qui réduit considérablement les possibilités d’indemnisation.

Il devra prouver que, du fait de la présence de la clause, il a été empêché d’accepter une offre d’embauche d’un concurrent.

Cette solution n’est que la mise en application du principe posé le 13 avril 2016, dans un arrêt par lequel la Cour de cassation a écarté la possibilité d’invoquer la notion de préjudice nécessaire.

Conclusion : la Cour de cassation poursuit ses revirements : le salarié doit prouver son préjudice avec des arguments et des pièces. A défaut, il ne pourra qu’être débouté de ses demandes par les juges.

 

Benjamin Louzier
Avocat Associé

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