Le point sur les seuils des « marchés publics »
1. Les modalités suivant lesquelles les acheteurs publics peuvent conclure leurs « marchés publics » sont fixées selon l’importance de l’achat, c’est-à-dire selon le montant du marché.
Il existe ainsi des modes de passation différents déterminés en fonction du montant HT maximal du marché estimé dès l’origine, ce montant maximal correspondant à un seuil fixé par la réglementation.
2. Comme il existe plusieurs catégories de « marchés publics », ces seuils ne sont pas homogènes et sont, en outre, relativement nombreux.
En effet, on distingue en droit entre les « pures » personnes publiques qui sont soumises au Code des marchés publics (c’est-à-dire principalement l’Etat, les collectivités locales et certains établissements publics et établissements de santé) et les « assimilées » personnes publiques qui, elles, sont soumises à l’Ordonnance du 6 juin 2005 (n° 2005-649).
Les différences existantes entre les « pures » personnes publiques et les « assimilées » personnes publiques expliquent et justifient d’une part que les règles organisant les modalités de passation des marchés publiques sont différentes (voir pour un exemple : CE, 23 décembre 2011, Etablissement public d’aménagement Euroméditerranée, req. n° 351505) et d’autre part que les seuils soient différents.
A l’intérieur de ces deux premières catégories, on distingue ensuite entre les pouvoirs adjudicateurs (PA) et les entités adjudicatrices (EA). Les entités adjudicatrices désignent une catégorie particulière d’acheteurs publics ayant une mission « spécifique » dans des domaines particuliers de « réseau » (transports publics par exemple).
Les règles encadrant la passation de leur marché différent principalement en raison de la structure concurrentielle du domaine d’activité considéré, ce qui explique pourquoi le Code des marchés publics est divisé en deux parties (Partie I pour les « pouvoirs adjudicateurs » et Partie II pour les « entités adjudicatrices »). L’Ordonnance de 2005 reprend également cette distinction qui a été traduite dans deux décrets d’application (le décret du 30 décembre 2005 n° 2005-1742 pour les « pouvoirs adjudicateurs » et le décret du 20 octobre 2005 n° 2005-1308 pour les « entités adjudicatrices »).
Les seuils applicables différent enfin selon que les marchés relèvent du Code des marchés publics ou de l’Ordonnance de 2005.
Pour les marchés relevant du Code des marchés publics (CMP) on distingue trois modes de passation de différents : les marchés de faible montant, les marchés à procédure adaptée (MAPA) et les marchés formalisés.
Pour les marchés relevant de l’Ordonnance de 2005 on ne distingue que deux situations différentes : les marchés « libres » et les marchés « formalisés ».
3. Le premier mode de passation concerne donc les marchés de « faible montant ».
Les marchés de « faible montant » correspondent à des achats inférieurs à 15.000 € pour les pouvoirs adjudicateurs (cf. art. 28 III CMP – D. n° 2011-1853, 9 déc. 2011, art. 3) et de 20.000 € pour les entités adjudicatrices (art. 146 CMP).
Pour ces achats, l’acheteur public est dispensé d’obligation de publicité et de mise en concurrence spécifique, mais il doit veiller à ne pas exclure toute concurrence si des opérateurs concurrents sont susceptibles de répondre au besoin.
Précisons que ces seuils de 15.000 et 20.000 € ne s’appliquent pas aux marchés relevant de l’Ordonnance de 2005.
4 Le deuxième mode de passation concerne les marchés à « procédure adaptée » du CMP, habituellement désignés sous l’acronyme « MAPA » (art. 26, 28 I CMP & D. 2011-2027 29 déc. 2011 ; art. 146 CMP).
En MAPA l’acheteur public à l’obligation de mettre en oeuvre des obligations de publicité et de mise en concurrence qu’il doit lui-même définir. C’est-à-dire que les modalités de passation ne sont pas fixées par le Code des marchés publics.
Pour les MAPA, le Code des marchés publics distingue plusieurs niveaux de seuils selon que l’acheteur public est l’Etat ou une collectivité locale, selon que sont achetés des services, des fournitures ou bien des travaux et selon que l’acheteur agit en tant que pouvoir adjudicateur ou entité adjudicatrice.
L’Etat « pouvoir adjudicateur » doit ainsi passer des MAPA pour ses marchés de fournitures et de services courants dont le montant est compris entre 15.000 et 130.000 €.
Les collectivités locales « pouvoirs adjudicateurs » doivent passer leurs MAPA de fournitures et de services courants lorsque le montant du marché est compris entre 15.000 et 200.000 €.
Lorsque l’Etat et les collectivités locales agissent en qualité d’« entités adjudicatrices » en fournitures courantes et services, le seuil des MAPA est compris entre 15.000 € et 400.000 €.
Le seuil des MAPA de travaux est le même pour l’Etat et les collectivités locales « pouvoirs adjudicateurs » et « entités adjudicatrices » : il est compris entre 15.000 et 5.000.000 €.
Précisons enfin qu’il existe deux catégories de marché de services : les services courants et les services dits allégés pour des prestations spécifiques « listées » par le Code des marchés publics (art. 29 et 30 CMP). Ces marchés de services allégés sont toujours des MAPA mais ils sont soumis à des procédures spécifiques lorsque leur montant dépasse 200.000 € (étant précisé que ceci vaut également au titre des marchés de l’Ordonnance de 2005 pour les seuils de 200.000 € [PA] et 400.000 € [EA]).
6. Le troisième mode de passation des marchés publics concernent les marchés « formalisés » du CMP, c’est-à-dire les marchés dont le montant est supérieur au seuil maximal des MAPA précités.
En procédure formalisée, l’acheteur public à l’obligation de mettre en oeuvre des obligations de publicité et de mise en concurrence strictement définies par le Code des marchés publics.
7. Reste enfin la situation des marchés formalisés de l’Ordonnance de 2005.
Les achats de fournitures et services des pouvoirs adjudicateurs doivent être passés selon la procédure formalisée lorsque leur montant dépasse 130.000 € pour l’Etat et 200.000 € pour les collectivités locales. Ce seuil est porté à 5.000.000 € pour les travaux.
Les achats de fournitures et services des entités adjudicatrices doivent être passés selon la procédure formalisée lorsque leur montant dépasse 400.000 € et 5.000.000 € pour les travaux.
Alexandre Le Mière
Avocat associé