Le candidat à un marché public peut rectifier une erreur purement matérielle affectant son offre
1. Le principe de l’intangibilité de l’offre en marché public (qui a été forgé par la jurisprudence et qui découle notamment des articles 48 et 59 du Code des marchés publics) interdit aux candidats de modifier leur offre après leur dépôt ou, à tout le moins, après la date d’expiration du dépôt des offres.
2. Cependant, nul n’étant à l’abri d’erreurs grossières purement matérielles, il arrive fréquemment que les pouvoirs adjudicateurs rejettent une offre d’un candidat sans lui avoir permis de rectifier une telle erreur. Et ce alors même qu’il est évident tant pour le pouvoir adjudicateur que pour le candidat qu’il s’agit d’une grossière erreur.
3. Dans sa décision Département des Hauts-de-Seine (CE, 21 septembre 2011, req. n° 349149), le Conseil d’Etat, sans nullement remettre en cause le principe de l’intangibilité de l’offre, vient d’indiquer qu’un candidat pouvait rectifier une « erreur purement matérielle ».
Le Conseil d’Etat est précis dans sa décision en ce sens qu’il n’ouvre aucune brèche dans le principe de l’intangibilité de l’offre : il ne permet nullement aux candidats de modifier leur offre ; il les autorise seulement à rectifier une erreur purement matérielle.
4. Probablement pour éviter toute dérive et une interprétation « extensive » de cette décision, une fois encore pragmatique, le Conseil d’Etat précise les conditions permettant de procéder à une telle rectification.
Il indique en effet qu’il faut d’abord qu’il ressorte de l’offre une erreur purement matérielle. En l’espèce, le Conseil d’Etat constate (sans appréciation) qu’une ligne tarifaire de la décomposition du prix n’avait pas été renseignée sur le bordereau.
Il faut ensuite que cette erreur rectifiable soit d’une nature telle que le pouvoir adjudicateur n’aurait pas pu s’en prévaloir de bonne foi dans le cadre de l’exécution du contrat si le candidat avait remporté l’appel d’offres.
5. En l’espèce, le pouvoir adjudicateur avait décelé un problème sur l’offre financière d’un candidat et l’avait interrogé à cette fin. Ce dernier, en réponse, avait rectifié son offre : le prix porté sur son bordereau initial était de 22 € au lieu d’un prix réel de 220 €.
Cette rectification avait conduit le pouvoir adjudicateur à éliminer son offre : le candidat avait alors porté l’affaire au contentieux dans le cadre d’un référé précontractuel.
Le Conseil d’Etat juge que « cette rectification pouvait ainsi intervenir sans méconnaitre, en l’espèce, le principe interdisant de modifier l’offre » validant ainsi la possibilité de rectifier les erreurs purement matérielles, mais sans aucunement remettre en cause le principe de l’intangibilité des offres.
Alexandre Le Mière
Avocat associé