Régularisation de construction non autorisée
Le fait de construire sans autorisation d’urbanisme constitue à la fois une illégalité administrative et une infraction pénale (art. L. 480-4 C. Urb). Cependant, l’infraction pénale se prescrit par trois ans et la prescription administrative reste encore rare (art. L.111-12 C. Urb).
Passés le délai de la prescription pénale, il est donc quasiment impossible de remettre en cause une construction. Parallèlement, le mécanisme des prescriptions administratives n’étant pas encore efficient, l’illégalité administrative d’une construction non autorisée continue de perdurer, mais sans qu’il soit alors possible de la remettre en cause sur ce seul fondement.
Il existe donc de nombreuses constructions anciennes non autorisées contre lesquelles ni les pouvoirs publics ni les tiers ne peuvent rien, mais sur lesquelles il est fréquent que des propriétaires souhaitent réaliser des travaux et à ce titre sollicitent une autorisation d’urbanisme.
Jusqu’à la décision du 3 mai 2011 (Mme Chantal Gisèle A, req. n° 320545), les pouvoirs publics se trouvaient donc dans l’obligation de refuser les autorisations d’urbanisme en application de la jurisprudence Thalamy (CE, 9 juillet 1986, req. n° 51172) et de composer avec les règles de prescriptions définies par l’article L.111-12 C. Urb..
Désormais, il appartient aux personnes publiques compétentes pour délivrer les autorisations d’urbanisme, lorsqu’elles sont saisies de demande de travaux portant sur une construction existante non préalablement autorisée :
– d’inviter les pétitionnaires à déposer un dossier complet portant sur l’ensemble de la construction – et non sur les seuls travaux envisagés ;
– de vérifier s’il est possible de régulariser la construction ;
– à défaut, après s’être assuré d’une part que tous les prescriptions pénales et civiles sont acquises et après avoir apprécié d’autre part les intérêts en présence, d’autoriser – éventuellement – les travaux « nécessaires à [l]a préservation [de la construction] et au respect des normes ».
Il appartient désormais, tant aux pétitionnaires en amont qu’aux services instructeurs en aval, d’intégrer cette nouvelle donne dans les opérations d’urbanisme, dès lors qu’il n’est plus possible d’ignorer les situations non autorisées même lorsqu’elles sont prescrites.
S’il apparaît que les implications et les conséquences de cette décision ne peuvent pas être totalement appréhendées de façon immédiate, il est d’ores et déjà certain que cette décision incite les pétitionnaires à une analyse plus précise de leur situation au regard du droit l’urbanisme lors de la préparation de leur dossier de demande d’autorisation et qu’elle oblige les collectivités publiques qui les délivrent à mettre en place de nouvelles procédures de contrôle et d’instruction en intégrant les nouveaux paramètres édictés par le Conseil d’Etat.
Alexandre Le Mière
Avocat associé