Depuis le 1er septembre 2020, les entreprises sont appelées à appliquer le « Protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise, face à l’épidémie de Covid-19 du 31 août 2020 ». Masques, référent covid, nombre de m2, etc..
Quelle est la portée juridique de ce protocole ?
Le décret no 2020-860 du 10 juillet 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 existe mais il ne vise pas expressément le Code du travail (alors qu’il en cite 15) et il ne se prononce pas sur le port du masque.
Donc en apparence le protocole n’a pas de valeur contraignante et aucune verbalisation ne pourrait avoir lieu sur son fondement.
Mais attention…
- Néanmoins, l’Inspecteur du travail peut il verbaliser ?
OUI, mais sur d’autres textes :
Si le protocole ne peut servir, en tant que tel, aux inspecteurs du travail, comme fondement d’un procès-verbal, il peut être raccroché aux articles du Code du travail relatifs à la prévention des risques, dont il est la déclinaison.
L’article L. 4121-1 indique :
« L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
« Ces mesures comprennent :
1o Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L. 4161-1 ;
2o Des actions d’information et de formation ;
3o La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
« L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes. »
Le protocole « coche toutes les cases ».
L’article L. 4121-2 peut également servir de base à un procès-verbal, car c’est lui qui explicite la démarche de prévention. Il insiste notamment, comme dans le protocole, sur la nécessité de « prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ».
L’article L. 4221-1 du Code du travail relie à la santé des travailleurs les dispositions relatives à l’aménagement des locaux et à leur entretien.
- Le risque judiciaire : la suspension d’activité ?
OUI
Les entreprises qui décideraient de faire fi du protocole sanitaire ou de ne l’appliquer que « mollement », prennent le risque d’une action judiciaire menée en référé par les syndicats en vue de faire suspendre l’activité sur site en attendant que les mesures de prévention aient été prises.
La suspension de l’activité est d’ailleurs la seule mesure qui puisse être demandée en justice. Le juge des référés peut l’ordonner en attendant l’évaluation des risques et l’actualisation du document unique ou encore la consultation du CSE.
- Mise en jeu de la responsabilité pénale sur le fondement du protocole sanitaire ?
NON
Les dispositions du Code du travail nous semblent trop générales pour permettre une telle incrimination. Mais si le juge pénal retient les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail, ce risque n’est pas à écarter, les dispositions préconisées étant concrètes et précises.
Benjamin Louzier
Avocat Associé