Aperçu des dernières décisions rendues en matière de visites et saisies de la DGCCRF et de l’ADLC.
Les décisions rendues au cours de l’année 2016, principalement par la chambre criminelle de la Cour de cassation, et le Conseil Constitutionnel, permettent de mettre en exergue les difficultés auxquelles sont confrontées les entreprises faisant l’objet de perquisitions de l’ADLC ou de la DGCCRF pour contester les saisies opérées, ou pour former un recours contre certaines demandes de l’administration.
Ces décisions sont par ailleurs intéressantes pour envisager la stratégie à opérer pour obtenir un contrôle effectif en temps réel de ces visites et saisies par le juge compétent.
Elles intéressent toutes les phases de la procédure, son autorisation, son déroulement et les recours potentiels pour contester certaines demandes de l’administration.
- Autorisation des visites et saisies
Dans une première décision (Cass. crim., 29 juin 2016, n°15-81.889), la chambre criminelle refuse d’annuler l’ordonnance du Premier Président de la Cour d’appel de Nîmes qui avait confirmé l’ordonnance du JLD de Privas autorisant les visites et saisies, en considérant que le JLD avait pu valablement déduire du rapprochement d’indices « qui pris isolément [n’étaient] pas suffisamment pertinents », que des pratiques prohibées « étaient en train de se commettre ».
Cette décision valide ainsi une procédure fondée sur des indices matériels dont la valeur était critiquée par l’entreprise investiguée.
- Déroulement des visites et saisies
- L’entreprise investiguée ne peut solliciter elle-même le contrôle en temps réel du JLD
Dans cet arrêt (Cass. crim., 9 mars 2016, n°14-84.566), la chambre criminelle casse l’ordonnance du Premier président de la Cour d’appel ayant annulé des saisies opérées alors que l’entreprise investiguée n’avait pas bénéficié de façon effective du contrôle du JLD prévu par l’article L.450.4 du Code de commerce alors que ce dernier avait été sollicité par son conseil.
La chambre criminelle juge au visa de l’article susvisé que « l’occupant des lieux ne dispose pas du droit de saisir lui-même le juge qui a autorisé la visite et la saisie, les officiers de police judiciaire, chargés d’assister aux opérations devant, au cours de la visite, tenir ce magistrat informé des difficultés stratégiques ».
Cette décision est importante d’un point de vue stratégique. Elle implique que l’entreprise sujette à un down raid de l’ADLC devra convaincre l’OPJ de saisir le JLD si elle estime qu’une difficulté est rencontrée lors de la perquisition ou des opérations de saisies.
- Les difficultés liées au contrôle de l’étendue des saisies pratiquées
Une décision de la chambre criminelle pointe également du doigt les difficultés pour une entreprise investiguée de faire sanctionner le caractère disproportionné des saisies opérées (Cass. crim., 29 juin 2016, n°15-81.890).
En l’espèce était contesté le caractère massif et indifférencié de saisies informatiques opérées à partir de recherches par mots clés dont la pertinence n’avait pas été contrôlée par le juge ayant autorisé les mesures.
Pour autant, la chambre criminelle considère que les agents de l’administration avaient « procédé à une saisie sélective de certains fichiers à partir de mots-clés dont ils n’avaient pas à rendre compte et sur lesquels le premier président n’était pas tenu de se fonder » et que l’entreprise avait reçu « avant la saisie, un inventaire des fichiers saisis ainsi qu’une copie de ceux-ci [la mettant] en mesure d’en prendre connaissance ».
- Absence de recours direct contre certaines demandes de l’administration
Enfin, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la constitutionnalité de l’article L. 450-3 du Code de commerce qui autorise les demandes de communication d’informations et de documents par les agents de l’administration, qui était contestée du fait de l’absence de voie de recours immédiate et autonome contre ces demandes (Cass. com. 4 mai 2016, pourvois n° 15-25.699 et 15-25.701).
Le Conseil constitutionnel déclare les dispositions contestées conformes à la Constitution aux motifs d’une part les mesures visées ne sont pas susceptibles de faire grief et que d’autre part, au motif que la légalité des demandes d’information peut toujours être contestée par voie d’exception si une procédure est engagée à la suite d’une enquête ou si une astreinte ou une sanction est prononcée à l’encontre de l’entreprise concernée.
Guillaume Gouachon
Avocat à la Cour