Archives de catégorie : Public

LES DARK STORES SONT QUALIFIES D’ENTREPOTS PAR LE CONSEIL D’ETAT

Par un arrêt du 23 mars 2023, le juge des référés du Conseil d’Etat a retenu la destination d’entrepôt aux dark stores détenus par les sociétés Frichti et Gorillas « même si des points de retrait peuvent y être installés ».

En effet, le Conseil d’Etat a annulé l’ordonnance du 5 octobre 2022 par laquelle le tribunal administratif de Paris, statuant en référé, avait assimilé les dark stores à des constructions et installations nécessaires aux services publics ou d’intérêt collectif (CINASPIC), considérant que l’occupation de ces locaux ne correspondait pas à une logique de logistique urbaine.

Ce faisant, la juridiction confirme la position du gouvernement et surtout de la Ville de Paris qui tente de limiter l’implantation en centre-ville de dark stores.

Ainsi, le Conseil d’Etat a validé les restitutions des locaux prononcées par la Ville de Paris à l’encontre des deux sociétés dès lors que le changement de destination (de commerce à entrepôt) avait été réalisé sans déclaration préalable et qu’aucune régularisation n’était possible au regard des règles du plan local d’urbanisme de la Ville.

Pour rappel, les locaux à destination d’entrepôts ne sont admis à Paris que sur des terrains ne comportant pas d’habitation et sont interdits dans les locaux situés en RDC sur rue. Sont ainsi concernés par un tel risque les dark store installés ou déclarés sous la destination de « commerce et activités de service » au sens de l’article R. 151-28 du Code de l’urbanisme.

L’annulation de la suspension prononcée par le juge des référés du tribunal de Paris va permettre à la Ville de continuer sa stratégie de fermeture forcée des dark stores sur le fondement de l’interdiction des entrepôts sur toutes les emprises foncières comportant de l’habitation.

CE, 23 mars 2023, n° 468360

Ombeline Soulier Dugenie
Avocate à la Cour, Associée
Redlink

Renforcement des pouvoirs de la DGCCRF en matière d’injonction

Le décret du 29 décembre 2022 (n°2022-1701) précise les modalités d’application de la loi « pouvoir d’achat » du 16 août 2022 et confirme le renforcement des pouvoirs de la DGCCRF en matière d’injonction administrative.

1- Le « name & shame » renforcé en matière d’injonctions de la DGCRRF

Le « name & shame » consiste à ordonner la publication de la sanction, aux frais de la personne sanctionnée, sur les supports suivants : voie de presse, voie électronique ou voie d’affichage – la publication par voie d’affichage comprenant les sites web et réseaux sociaux de la DGCCRF mais aussi de la personne contrôlée. Cette publication est également susceptible d’être ordonnée au Journal Officiel ou dans des organes de presse spécialisée.

Cette publication peut porter sur l’intégralité ou sur une partie de la décision ou prendre la forme d’un communiqué informant le public des motifs et du dispositif de cette décision.

Jusqu’alors appliqué en complément des sanctions administratives de la DGCCRF et des injonctions de cesser tout agissement illicite ou de supprimer toute clause illicite ou interdite, le « name & shame » est étendu :

  • aux injonctions de se conformer à ses obligations,
  • aux injonctions sous astreinte pour pratique commerciales restrictives (ces dernières ne pouvant auparavant qu’être publiées lorsque le professionnel ne s’était pas mis complétement en conformité à la suite de cette injonction).

Ainsi, à la différence des sanctions, les injonctions consistent à ordonner à un professionnel de cesser un agissement illicite, de se conformer à la réglementation ou de supprimer une clause illégale dans tous les champs d’action de la DGCCRF : lutte contre les pratiques restrictives de concurrence et la protection des consommateurs.

Le prononcé d’une injonction se veut donc préventif et dissuasif et peut donner lieu à une éventuelle sanction administrative, notamment pécuniaire, en cas de non-respect.

Alors même que l’injonction ne constitue pas une sanction, la publication de cette injonction constitue une véritable sanction pour l’opérateur économique : préjudice d’image.

Le renforcement de la capacité d’informer de la DGCCRF vise aussi à instaurer la confiance dans l’économie pour protéger le pouvoir d’achat.

A cet égard, il est ajouté que la publication des injonctions peut être accompagnée d’un message de sensibilisation des pratiques relevées.

La communication est alors l’occasion pour la DGCCRF, à partir des manquements relevés, de rappeler aux consommateurs ce qui constitue des pratiques commerciales abusives, illicites ou anticoncurrentielles ainsi que les droits et obligations de chaque acteur.

Dans les cas d’injonction numérique, il est précisé également que celle-ci peut être accompagnée d’une injonction adressée aux plateformes de rediriger les utilisateurs d’un site bloqué vers une page d’information du ministère chargé de l’économie, indiquant le motif de la mesure de limitation d’accès.

2- Comment contester les mesures de publication de la DGCCRF ?

Les mesures de publication ordonnées par la DGCCRF en complément des injonctions ou des sanctions peuvent être contestées devant le juge administratif qui, après avoir contrôlé la proportionnalité de la mesure de publication, peut prononcer son annulation ou en réduire la durée.

Ce recours peut être exercé en même temps que la contestation de l’injonction ou de la sanction ou même individuellement.

Le recours doit être exercé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la mesure de publication ordonnée par la DGCCRF.

Un recours gracieux ou hiérarchique peut être préalablement exercé et prorogera, de 2 mois, le délai de recours contentieux devant le tribunal administratif.

Par Ombeline SOULIER DUGENIE

L’insuffisance d’une étude d’impact environnemental justifie l’action en démolition d’un parc éolien.

Par un arrêt du 11 janvier 2023 (Cass. 3ème civ., 11 janvier 2023, n°21-19.778), la Cour de cassation assouplit les conditions d’une action en démolition suite à l’annulation d’un permis de construire.

1- Rappel de l’action en démolition

1.1- En application de l’article L.480-13 du Code de l’urbanisme (C. Urba.), lorsqu’une construction a été édifiée conformément à un permis de construire, le propriétaire d’une construction ne peut être condamné par le juge judiciaire à la démolir que sous certaines conditions :

  • le permis doit avoir été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative ;
  • la construction doit méconnaitre les règles d’urbanisme ou les servitudes d’utilité publique.

1.2- Les constructions litigieuses susceptibles d’être démolies doivent se situer dans un des secteurs énumérés à l’article L.480-13 C. Urb.

En dehors de ces secteurs, seule une action indemnitaire pourra être intentée.

2- La portée de la décision : l’assouplissement de l’action en démolition

Par un arrêt du 11 janvier 2023, la Cour de cassation a considéré que l’insuffisance d’une étude d’impact relative à la présence d’un couple d’aigles royaux constituait une violation à une règle d’urbanisme, justifiant ainsi l’action en démolition intentée par les associations de protection de l’environnement contre un parc éolien.

Ce faisant, la Cour de cassation assouplit incontestablement les conditions de mise en œuvre de l’action en démolition qui n’était jusqu’alors susceptible d’aboutir qu’en cas de violation d’une règle d’urbanisme « de fond » ou substantielle.

Toutefois, le demandeur devra démontrer avoir subi un préjudice personnel en lien de causalité directe avec cette violation.

3- Comment éviter les risques de démolition en cas d’annulation d’un permis de construire ?

Pour éviter tout risque de démolition, il est possible de purger les illégalités d’un permis attaqué devant le tribunal administratif, par un permis de construire de régularisation (L. 600-5-1 C.Urb.).

Il est également possible de limiter l’annulation du permis à un vice n’affectant qu’une seule partie du projet et d’obtenir la régularisation de la partie annulée du permis (L.600-5 C. Urb.).

Ces procédures de régularisation sont possibles même après l’achèvement des travaux et peuvent être exercées en cours d’instance.

Ombeline SOULIER DUGENIE

Avocat

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046990196?init=true&page=1&query=21-19.778&searchField=ALL&tab_selection=all

La Cour de Cassation entérine la décision de la CJUE et valide à son tour la règlementation française anti-Airbnb.

Rappelons que la Cour de cassation avait saisi la CJUE le 15 novembre 2018 d’une question préjudicielle sur la compatibilité de la réglementation française avec la directive européenne 2006-123 sur la libre prestation de services dans le marché intérieur (cf. article du blog Redlink du 11 mars 2019 http://iblog.redlink.fr/2019/03/11/reglementation-airbnb/)

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