Archives de catégorie : Social

Contrôle Urssaf : une nouvelle solution pour faire annuler facilement le redressement

Dans une décision récente le Tribunal de Nîmes juge que dès lors que l’Urssaf a manqué à son obligation de mentionner la liste complète et précise des documents dans la lettre d’observations, le redressement est nul (TJ Nîmes, 4 juill. 2024, no 23/00337, no 23/00420)

  1. Les faits

Une société avait fait l’objet d’un contrôle Urssaf en matière de recherche des infractions aux interdictions de travail dissimulé.

Le cotisant soutenait que la lettre d’observations ne mentionnait pas dans la liste des documents consultés, l’ensemble des documents sur lesquels l’organisme s’était appuyé, notamment les copies des chèques émis et encaissée entre le 1er janvier 2017 et le 31 octobre 2021, outre deux fichiers Excel reprenant les sommes injustifiées sur les ventes et les dépenses, de sorte que la lettre d’observations était irrégulière.

2. La décision

Il ressort de la lettre d’observations en date du 22 septembre 2022 que l’Urssaf s’est fait transmettre par les différentes banques les copies des remises de chèques encaissés et des chèques émis et qu’elle les a analysées. Il en résulte donc que lesdits documents ont servi de base aux opérations de contrôle. Dès lors, ces documents devaient expressément figurer dans la rubrique consacrée à l’énumération de la liste des documents consultés par l’Urssaf.

Aucune mention n’avait été faite de la consultation des chèques encaissés et émis, seule figurant la mention de la consultation des relevés bancaires.

L’Urssaf avait manqué à son obligation de mentionner la liste complète et précise des documents. Les opérations de contrôle étaient donc irrégulières, ce qui entraînait la nullité du redressement, de la mise en demeure et de la contrainte délivrée qui s’y référaient.

3. La portée du jugement

La liste exhaustive des pièces examinées lors du contrôle doit figurer dans la lettre d’observations soit dans la rubrique dédiée au sein de la lettre d’observations, soit dans le corps du document (voir CA Amiens, 2e protection sociale, 30 janv. 2024, no 22/04060).

Il convient que ce relevé soit complet et précis (voir dans le même sens : CA Toulouse, 4e ch., sect. 3, 7 mars 2024, no 22/02524 ; CA Caen, 2e ch. soc., 27 juin 2024, no 22/02302).

Conseils pratiques :

  • Bien conserver les emails échangés avec l’URSSAF sur les demandes de pièces.
  • En cas de contrôle sur place et de prise de documents par les contrôleurs : toujours faire un email actant des documents remis.

Benjamin Louzier
Avocat à la Cour, Associé
Redlink
Tel. 33 (0)1 73 31 00 03 – Fax. 33 (0)1 73 31 00 30
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louzier@redlink.fr

Redlink News – Télétravail à l’étranger : faute grave du salarié qui refuse de revenir !

Dans un jugement récent (Cons. Prud’h. Paris 1-8-2024 n° 21/06451), le conseil de prud’hommes de Paris a admis qu’une salariée télétravaillant depuis le Canada sans l’accord de son employeur avait commis une faute grave.
 

  1. Les faits


Une salariée embauchée en CDI en mai 2019 en qualité d’analyste flux et conformité obtient, à l’issue de ses congés payés d’été 2020 passés au Canada, l’accord de son employeur pour télétravailler provisoirement depuis ce pays, ce qui lui est accordé.
 
Début février 2021, l’employeur annonce le retour progressif en présentiel pour la fin du mois de février et demande à ses salariés à l’étranger de continuer à communiquer leur résidence provisoire à l’étranger, ce que la salariée ne fait pas.
 
L’employeur lui demande de se présenter sur son lieu de travail une dizaine de jours plus tard, ce qu’elle ne fait pas.
 
La salariée est alors licenciée pour faute grave. Elle conteste son licenciement.
 

  1. Les arguments permettant de licencier pour faute grave

 
D’abord les juges s’appuient sur les risques encourus par la société du fait de l’activité de la salariée sur le territoire canadien : les juges du fond relèvent en effet que cette activité s’exerçait sans aucune autorisation des autorités canadiennes et en violation des règles sur le règlement général sur la protection des données (RGPD).
 
Ensuite ils relèvent un certain nombre de faits qui constituent, de la part de la salariée, une violation des obligations résultant de son contrat de travail : le fait de ne pas avoir recueilli l’accord préalable de son employeur pour télétravailler depuis le Canada, d’avoir adopté une attitude déloyale en lui dissimulant ce télétravail depuis ce pays et de ne pas avoir repris son poste en présentiel malgré une mise en demeure en ce sens.
 
Enfin, sont retenues les règles de droit applicables au travail des étrangers dans le pays où s’exerce le télétravail. De nombreux pays exigent en effet que les travailleurs étrangers disposent d’une autorisation administrative pour exercer une activité sur leur sol. Le fait, pour l’employeur, de ne pas avoir demandé/obtenu cette autorisation peut l’exposer à des sanctions.

Bien que les juges du fond ne l’évoquent pas, il pourrait aussi y avoir d’autres risques, notamment en matière de sécurité sociale (règles d’affiliation, difficultés en cas d’accident du travail, etc.).
 

Conseils pratiques :

  • Vérifier si le salarié télétravail dans l’UE ou hors UE, car les règles du RGPD sont différentes.
  • Encadrer très précisément les pratiques du télétravail par une charte ou un accord.

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Benjamin Louzier
Avocat à la Cour, Associé
Redlink
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Harcèlement moral : l’employeur n’a pas l’obligation d’ouvrir une enquête interne

Harcèlement moral : l’employeur n’a pas l’obligation d’ouvrir une enquête interne !

Dans une décision récente (Cass. soc., 12 juin 2024, nº 23-13.975 FS-B) la Cour de cassation a jugé que l’employeur avait pris les mesures suffisantes de nature à préserver la santé et la sécurité de la salariée. Il en a déduit, nonobstant l’absence d’enquête interne, que celui-ci n’avait pas manqué à son obligation de sécurité.

  1. Les faits

En l’occurrence, une salariée directrice des ressources humaines contestait son licenciement notifié pour faute grave, en invoquant un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité. Elle lui reprochait en effet de ne pas avoir ordonné d’enquête interne après qu’elle lui ait révélé être victime de harcèlement moral de la part d’une autre salariée.

La cour d’appel avait cependant rejeté sa demande au motif que l’employeur avait pris des mesures suffisantes pour préserver sa santé et sa sécurité, même en l’absence d’enquête interne.

  1. La décision

La Cour de cassation a approuvé cette décision, considérant :

« qu’ayant fait ressortir que l’employeur avait pris les mesures suffisantes de nature à préserver la santé et la sécurité de la salariée, la cour d’appel en avait valablement déduit que ce dernier n’avait pas manqué à son obligation de sécurité nonobstant l’absence d’enquête interne ».

Si l’employeur doit donc prendre les mesures suffisantes pour préserver la santé et la sécurité du salarié concerné, il n’est toutefois pas tenu d’inclure une enquête interne parmi celles-ci. L’absence d’un tel élément ne constitue pas nécessairement une abstention fautive, si d’autres mesures adéquates ont bien été prises.

En effet, on sait qu’informés de faits susceptibles de constituer un harcèlement, l’employeur doit, conformément à son obligation de sécurité, prendre immédiatement des mesures afin de faire cesser ces agissements (C. trav., art. L. 4121-1 et L. 1152-4). 

Parmi les actions à mettre en oeuvre, il sera amené à mener des investigations pour établir la réalité des faits et pouvoir les sanctionner. Il peut ainsi avoir recours à une enquête interne. Toutefois, l’ouverture d’une telle enquête n’est pas une obligation.

Benjamin LOUZIER

Associé/Partner

Avocat Spécialiste en droit social/Expert in Labour Law

Rupture conventionnelle: l’employeur peut faire condamner le salarié qui a menti à lui payer d’important dommages et intérêts !

Dans un arrêt du 19 juin (Cass. Soc 19 juin 2024 – 23.10.817)  la Cour de cassation annule une convention de rupture en raison d’un vice affectant le consentement de l’employeur.

Une telle rupture produit les effets d’une démission et oblige donc le salarié à rembourser l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle et à payer le préavis de démission non effectué.

  1. Les faits : le salarié a menti sur la création d’une société concurrente

Un commercial avait sollicité et obtenu une rupture conventionnelle auprès de son employeur, invoquant alors son souhait d’une reconversion professionnelle.

Cette demande était en réalité motivée par un projet de création d’une entreprise concurrente avec deux anciens collègues, projet qui s’est concrétisé cinq mois après la rupture de la relation de travail.

L’employeur a alors demandé la nullité de la convention de rupture en faisant valoir que son consentement avait été vicié en raison de la dissimulation, par le salarié, de son réel projet.

Le salarié considérait au contraire que, dans la mesure où son contrat ne comportait aucune clause de non-concurrence, il n’était pas tenu de révéler ses intentions. Il invoquait sa liberté d’entreprendre en créant une société après la rupture de son contrat,

  1. La décision

Les juges de la Cour de cassation indique « constitue un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie »(C. civ., art. 1137, al. 2):

– non seulement « le salarié avait volontairement dissimulé des éléments dont il connaissait le caractère déterminant pour l’employeur afin d’obtenir le consentement de ce dernier à la rupture conventionnelle » ;

– mais également « l’employeur s’est déterminé au regard du seul souhait de reconversion professionnelle dans le management invoqué par le salarié ».

Les juges en déduisent que « le consentement de l’employeur avait été vicié », la convention de rupture était donc nulle.

  1. La condamnation du salarié

La Cour de cassation précise : « lorsque le contrat de travail est rompu en exécution d’une convention de rupture ensuite annulée en raison d’un vice du consentement de l’employeur, la rupture produit les effets d’une démission ».

Le salarié devra :

  • rembourser le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle
  • payer le préavis de démission.
  1. Dans quels cas peut on faire condamner le salarié ?

L’employeur devra prouver qu’il a été trompé de manière déterminante.

On peut envisager au moins deux situations :

  • Création d’une société concurrente
  • Embauche par une société concurrente

Et quid du salarié qui obtient une rupture conventionnelle et qui attaque ensuite l’employeur pour demander le paiement de diverses sommes (heures supplémentaires ou autres) ? La question est posée…

Benjamin LOUZIER

Associé/Partner

Avocat Spécialiste en droit social/Expert in Labour Law

Prêt au salarié : mettez une clause de déchéance du terme en cas de départ !

Prêt au salarié : mettez une clause de déchéance du terme en cas de départ !

Dans un arrêt récent (Cass. soc. 2-5-2024 n° 22-17.878 F-D, D. c/ Sté Axa assistance France) la Cour de cassation juge que le prêt consenti par l’employeur à un salarié peut valablement prévoir le remboursement anticipé du prêt en cas de licenciement ou de démission.

  1. Les faits

Un salarié conclut avec son employeur un contrat de prêt pour l’acquisition d’un appartement. Le contrat de prêt contient une clause de déchéance de terme prévoyant le remboursement du prêt en cas de départ du salarié de l’une des sociétés du groupe pour quelque cause que ce soit, démission ou licenciement. L’employeur licencie le salarié et lui réclame le remboursement du solde du prêt.

  1. La décision

La Cour de cassation juge que l’employeur pouvait se prévaloir de la clause de remboursement de prêt. La clause d’un prêt consenti par un employeur, selon laquelle le remboursement de ce prêt sera anticipé en cas de départ du salarié de l’entreprise, ne constitue pas une condition purement potestative (C. civ. 1304-2) de celui qui s’oblige au remboursement du prêt dès lors que l’anticipation de ce remboursement relève tant de l’initiative de l’employeur en cas de licenciement que de celle du salarié en cas de démission.

Benjamin LOUZIER

Associé/Partner

Redlink News : La dissimulation d’une relation intime entre salariés d’une même entreprise : licenciement pour faute grave justifié !

Dans deux décisions récentes (CA Bordeaux 17-4-2024 n° 21/01972 ; Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-16.218, F-B) les juges ont considéré que la dissimulation d’une relation intime entre salariés peut constituer un manquement à l’obligation de loyauté et donc une faute grave.

  1. Liaison d’un DRH avec une salariée porte atteinte à son obligation de neutralité

Dans un arrêt du 17 avril 2024, la cour d’appel de Bordeaux confirme le licenciement d’un DRH pour faute grave pour avoir entretenu une liaison avec une salariée, manquant ainsi à son obligation de neutralité.

  • Les faits :

Une salariée dépose une plainte pour violences et agressions sexuelles contre le DRH de l’entreprise.

La lettre de licenciement reproche au DRH d’avoir « entretenu des relations très intimes » avec une salariée, ce que ce dernier ne conteste pas.

Pour l’entreprise, « si effectivement ces faits relèvent de [sa] vie privée, ces derniers ont eu clairement des conséquences fort préjudiciables tant pour [la salariée] concernant la poursuite de son contrat de travail que pour le reste du personnel ».

Le DRH reproche à son employeur de l’avoir licencié alors que la plainte de la salariée a été retirée et qu’il a été relaxé par le tribunal correctionnel.

  • Décision :

Les juges du fond confirment le licenciement du DRH, indépendamment des faits qui n’ont pas été retenus pénalement.

Ils estiment qu’en « entretenant une relation intime avec [la salariée], [le DRH] a contrevenu à l’obligation de neutralité pesant sur un directeur des ressources humaines et manqué à l’obligation de loyauté à l’égard de son employeur qu’il n’avait pas informé de sa situation personnelle et des conséquences de celles-ci sur l’exercice de ses fonctions ».

La cour d’appel constate en effet que le DRH « supervisait voire intervenait dans l’exercice des fonctions de responsable des ressources humaines prenant part, même à titre consultatif, aux décisions relatives aux procédures et décisions disciplinaires et à l’évolution de la carrière des salariés ».

  1. Dissimulation d’une relation intime : manquement à l’obligation de loyauté
  • Les faits :

Dans cette décision (Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-16.218, F-B) : le DRH est licencié pour avoir caché à son employeur la liaison qu’il entretient avec une autre salariée, exerçant des mandats de représentation syndicale.

  • Décision :

La Cour de cassation confirme la validité de la faute grave et rappelle qu’un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’i lconstitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. En l’espèce, en dissimulant cette relation intime, qui était en rapport avec ses fonctions professionnelles et de nature à en affecter le bon exercice, le salarié a ainsi manqué à son obligation de loyauté à laquelle il était tenu envers son employeur, rendant impossible son maintien dans l’entreprise, « peu important qu’un préjudice pour l’employeur ou pour l’entreprise soit ou non établi. »

Conclusion :

Il devient possible de règlementer dans le règlement intérieur ce type de relation avec des obligations de déclaration pour les manager.

Benjamin LOUZIER

Attention à ce que vous dites au salarié par téléphone !

La Cour de cassation vient de juger que le licenciement annoncé au salarié lors d’une conversation téléphonique, avant l’envoi de sa lettre de licenciement, est verbal et donc sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 3-4-2024 n° 23-10.931 F-D, Sté Legallais c/ K).

1. Les faits

Après avoir été contacté téléphoniquement le 7 février 2019 par la DRH qui l’a informé de son licenciement, un salarié reçoit par la suite une lettre de licenciement pour faute grave postée le même jour.

Estimant avoir fait l’objet d’un licenciement verbal, il saisit la juridiction prud’homale.

Pour sa défense, l’employeur fait valoir que la société a prévenu le salarié de son licenciement par téléphone le jour même de l’envoi de la lettre de licenciement par courtoisie, afin de lui éviter de se présenter à une réunion et de se voir congédier devant ses collègues de travail.

Il convient de rappeler que l’employeur qui décide de licencier un salarié doit lui notifier sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette dernière doit comporter l’énoncé du ou des motifs de rupture du contrat de travail (C. trav. art. L 1232-6).

Le licenciement verbal, qui par définition n’est pas motivé, est systématiquement jugé sans cause réelle et sérieuse.

2. La décision

La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir jugé le licenciement du salarié sans cause réelle sérieuse.

La cour d’appel avait relevé que le salarié rapportait la preuve qu’il avait été informé verbalement de son licenciement, à l’occasion d’une conversation téléphonique avec la DRH et que cette conversation avait eu lieu avant l’expédition de la lettre de licenciement.

Les déclarations du salarié étaient en effet confortées par le témoignage de deux collègues qui avaient écouté la conversation, car le salarié avait enclenché le haut-parleur du téléphone, sans prévenir l’employeur…

La Cour de cassation, rappellent qu’un appel téléphonique ne peut pas suppléer la lettre de licenciement adressée ultérieurement. Ce principe s’applique même si la lettre de licenciement est adressée au salarié le jour même.

Le licenciement est donc jugé sans cause.

3. Solution/précaution

Pour éviter le licenciement verbal, il faut dans l’ordre :

  • Envoyer la lettre de licenciement, c’est-à-dire la mettre au courrier avec une heure précise de dépôt du RAR
  • En envoyer un exemplaire par email au salarié pour avoir l’heure d’envoi
  • Et ensuite appeler le salarié pour le prévenir de l’envoi de la lettre et qu’il est inutile qu’il se présente le lendemain au bureau

Congés payés et maladie : les nouvelles règles

Les 9 et 10 avril 2024, le Sénat puis l’Assemblée nationale ont définitivement adopté l’ensemble du projet de loi qui a reconnu à tous les salariés en arrêt maladie le droit d’acquérir des congés payés durant cette période.

Seront ainsi assimilées à du travail effectif, pour déterminer la durée des congés payés :

– les périodes de suspension du contrat de travail pour  accident du travail ou maladie professionnelle, y compris lorsqu’elles excèdent 12 mois. La limite d’une durée ininterrompue d’un an disparaîtra en effet du Code du travail ;

– les périodes de suspension du contrat en raison d’un accident ou d’une maladie n’ayant pas un caractère professionnel.

  1. Maladie non professionnelle : 2 jours de congés par mois

Par dérogation au principe selon lequel le salarié a droit à un congé de 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif, l’acquisition de congés payés pendant les arrêts de travail pour accident ou maladie non professionnels sera limitée à deux jours ouvrables par mois, dans la limite de 24 jours ouvrables par période de référence. 

  1. Période de report des congés payés limitée à 15 mois

Le salarié dans l’impossibilité, pour cause de maladie ou d’accident (professionnel ou non), de prendre au cours de la période de prise des congés tout ou partie des congés payés qu’il a acquis, disposera d’une période de report de 15 mois pour les utiliser. À l’issue de celle-ci, les congés non pris seront perdus.

La loi fixe le point de départ de cette période de report à la date à laquelle le salarié reçoit de l’employeur, postérieurement à sa reprise du travail, les informations sur ses droits à congés payés.

Par exception, si le salarié est en arrêt de travail pour maladie ou accident (professionnel ou non) depuis au moins un an à la date à laquelle s’achève la période de référence au titre de laquelle les congés ont été acquis, le point de départ du délai de 15 mois est fixé à la fin de cette période d’acquisition. Si la période de report n’est pas expirée à la date de reprise du travail, elle sera suspendue jusqu’à ce que le salarié ait reçu de l’employeur les informations sur ses droits à congés payés.

  1. Information du salarié de retour d’arrêt sur ses droits à congés payés

À l’issue d’une période d’arrêt de travail pour maladie ou accident (professionnel ou non), l’employeur sera tenu de porter à la connaissance du salarié, dans le mois suivant sa reprise du travail :

– le nombre de jours de congé dont il dispose ;

– la date jusqu’à laquelle ces jours de congé peuvent être pris.

Cette information pourra être réalisée par tout moyen notamment via le bulletin de paie.

  1. Application rétroactive des nouvelles règles au 1er décembre 2009

Ces nouvelles dispositions relatives à l’acquisition et au report des droits s’appliqueront également pour la période courant du 1er décembre 2009 à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle.

  1. Délai de forclusion de deux ans pour les rappels de congés payés et prescription

S’agissant des actions nouvelles visant à obtenir l’octroi de jours de congés payés au titre de périodes d’arrêt maladie antérieures à l’entrée en vigueur de la loi d’adaptation au droit de l’Union européenne, un délai de forclusion sera opposable aux salariés dont le contrat de travail est toujours en cours. Ainsi, toute action en exécution du contrat de travail devra être introduite dans un délai de deux ans à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle.

S’agissant des contrats de travail déjà rompus lors de l’entrée en vigueur de la loi, la loi d’adaptation au droit de l’Union européenne ne modifie pas les règles de prescription de droit commun, lesquelles impliquent l’application de la prescription triennale des actions en matière de paiement de salaires (C. trav., art. L. 3141-5).

Vous pouvez attaquer au pénal en diffamation le salarié qui vous accuse de harcèlement !

Une salariée dénonçant des faits de harcèlement (sexuel et agression sexuelle en l’espèce) par email transmis tant à son employeur qu’à des personnes extérieures à celle-ci peut être condamnée pour diffamation publique (CEDH, 18 janv. 2024, no 20725/20, Allée c./ France)

  1. Les faits

La requérante exerçait les fonctions de secrétaire dans une association.

Elle adressa un email, depuis son adresse personnelle, dont l’objet était « Agression sexuelle, Harcèlement sexuel et moral ».

Les destinataires de cet email étaient le directeur général de l’association et, en copie, l’inspecteur du travail, son époux, le vice-président ainsi que les deux fils de ce dernier.

L’époux de la requérante relaya ses accusations sur le mur Facebook d’une connaissance, qualifiait le vice-président de « prédateur sexuel » et évoquait des faits de « viol ».

  1. La position de la Cour d’appel

Le 16 janvier 2018, le tribunal correctionnel de Paris déclara la requérante et son époux coupables de diffamation publique envers un particulier.

Ensuite de l’appel interjeté par la requérante, la cour d’appel de Paris, suivant arrêt du 21 novembre 2018, a confirmé partiellement le jugement en diminuant le montant de l’amende.

La requérante s’est pourvue en cassation en se fondant sur une violation de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme sur la liberté d’expression et sur le droit d’alerte.

Par un arrêt du 26 novembre 2019, la Cour de cassation rejeta le pourvoi de la requérante et confirma la condamnation au titre de la diffamation publique.

La requérante a alors formé un recours devant la CEDH sur la base de la violation de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme.

  1. Diffamation publique : Éléments constitutifs

L’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse définit la diffamation comme « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé ».

Un salarié ne peut être poursuivi pénalement en raison de la dénonciation de faits de harcèlement auprès des organes chargés de veiller à l’application des dispositions du Code du travail (en l’espèce le directeur des ressources humaines, le CHSCT et l’inspection du travail (Cass. 1re civ., 28 sept. 2016, no 15-21.823).

Dans la situation d’espèce, la salariée avait adressé un email, non seulement au directeur général, au vice-président, à l’inspection du travail, mais également aux deux fils du vice-président, dont l’un n’exerçait aucune fonction au sein de l’association.

Un des fils et l’époux de la salariée étant des personnes totalement étrangères à l’association, la diffamation revêtait donc un caractère public.

  1. Attention à l’exception de bonne foi

La loi précitée sur la liberté de la presse prévoit un fait justificatif dans les actions en diffamation, à savoir l’exception de vérité.

Ainsi, si la personne poursuivie pour diffamation parvient à démontrer que les faits qu’elle a dénoncés sont exacts, la diffamation n’est plus constituée.

Compte tenu des difficultés pouvant être rencontrées pour justifier la réalité des faits allégués, il est également admis par la jurisprudence que la personne poursuivie puisse s’exonérer de sa responsabilité en démontrant sa bonne foi.

Toutefois, la Cour de cassation ne retient pas celle-ci en jugeant « que, s’il existe des éléments permettant d’établir la réalité d’un harcèlement moral, voire sexuel dans la perception qu’a pu en avoir Mme U…, rien ne permet de prouver l’existence de l’agression sexuelle, que celle-ci date de l’année 2015 et pour laquelle elle n’a pas déposé plainte et ne peut produire ni certificat médical ni attestations de personnes qui auraient pu avoir connaissance, si ce n’est des faits, au moins du désarroi de la victime. »