Contrat public : le contrôle du prix à payer au sous-traitant d’un marché public

Contrat public : le contrôle du prix à payer au sous-traitant d’un marché public

1. Le sous-traitant d’un marché public relève du régime du paiement direct en application des dispositions de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance et des articles 62 et 63 de l’Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 et de l’article 135 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatifs aux marchés publics.

Cela signifie concrètement que le sous-traitant est payé directement par l’acheteur public qui est à l’origine de la commande (et ce alors même qu’il n’existe pas de lien contractuel direct entre ledit acheteur et le sous-traitant : ce dernier n’est contractuellement rattaché qu’à l’entreprise principale, titulaire du marché public).

2. Ce régime du paiement direct (règlement directement par l’acheteur / absence de lien contractuel) peut poser la question du niveau de contrôle que l’acheteur peut exercer sur l’exécution des prestations du sous-traitant avant la mise en œuvre du paiement.

En effet, en pratique (dans le régime actuel), le sous-traitant adresse sa demande de paiement simultanément à son cocontractant (le titulaire du marché) et à l’acheteur. Si, 15 jours après avoir reçu la demande de paiement, le titulaire n’a pas émis de réserve ou d’opposition, l’acheteur doit normalement acquitter la facture du sous-traitant.

Dans ce contexte, il peut arriver que le titulaire n’ait pas émis de réserve ou d’opposition sur la demande de paiement du sous-traitant, l’acheteur se trouvant alors théoriquement dans l’obligation de procéder au règlement.

Le Conseil d’Etat a précisément indiqué qu’il appartient à l’acheteur de « contrôler l’exécution effective des travaux sous-traités et le montant de la créance du sous-traitant », ce qui implique « au titre de ce contrôle, [de] s’assurer que la consistance des travaux réalisés par le sous-traitant correspondait bien à ce qui était prévu par le marché » (CE, 9 juin 2017, Société Keller Fondations Spéciales, req. n° 396358).

Le Conseil d’Etat précise également à cette occasion que le contrôle opéré par l’acheteur doit être étendu à la conformité des prestations au cahier des charges. En l’espèce, le sous-traitant avait fait valoir que si ses prestations n’étaient pas exactement conformes aux stipulations du marché, elles étaient, en toute hypothèse, conformes aux règles de l’art. Or, sur ce point, le Conseil d’Etat indique clairement que l’acheteur peut s’opposer au paiement direct de la somme sollicitée par le sous-traitant dès lors que ses prestations ne sont pas conformes au contrat, quand bien même elles respecteraient les règles de l’art.

3. Dans un contexte dans lequel le Conseil d’Etat procède à un recentrage et à un rappel des règles relatives à la sous-traitance (voir également : CE, 19 avril 2017, Société Angles et Fils, req. n° 396174), il revient aux opérateurs économiques d’être vigilants (et le cas échéant de faire le point) sur les règles applicables en la matière, qu’ils soient « entreprise principale » ou « sous-traitant ».

Il leur revient également de réfléchir au bon emploi des règles relatives à la sous-traitance, notamment à la lumière de la décision du 9 juin 2017, qui peut inciter, dans certaines hypothèses, à se coordonner avec l’action de l’acheteur public au titre de la gestion et de l’éventuelle sanction de la mauvaise exécution des prestations du marché public.

Alexandre Le Mière
Avocat associé

 

 

 

 

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