Le candidat à un marché public peut seulement rectifier une erreur purement matérielle affectant son offre
Dans sa récente décision Département des Hauts-de-Seine (CE, 21 septembre 2011, req. n° 349149), le Conseil d’Etat a indiqué qu’un candidat pouvait, sous certaines conditions, rectifier une « erreur purement matérielle » de son offre après son dépôt (cf. blog Redlink 04/10/2011).
Afin de bien cadrer le principe et le mécanisme de cette possibilité sans remettre en cause le principe d’intangibilité des offres, le Conseil d’Etat vient, dans un arrêt du 16 janvier 2012 (Département de l’Essonne, req. n° 353629), de « préciser » qu’il ne pouvait effectivement s’agir que d’une pure rectification d’une pure erreur matérielle.
La possibilité ne permet que de procéder à une « précision » ou à une « traduction » de ce qui a été initialement mentionné dans l’offre, mais en aucun cas de modifier son offre.
Dans cette affaire, un candidat avait proposé une valorisation de son offre pour répondre sur certaines prestations de déménagements ponctuels sur la base de tarifs journaliers alors que le règlement de la consultation sollicitait des tarifs horaires.
L’acheteur public ayant décelé cette erreur a donc interrogé le candidat en application de l’article 59 du Code des marchés publics et, désormais, de la jurisprudence Département des Hauts de Seine précitée.
En réponse, le candidat ne s’est pas borné à diviser les montants journaliers par le nombre d’heures de travail d’une journée, mais il a proposé des montants différents, ce qui a conduit l’acheteur public à rejeter son offre comme irrégulière.
Le Conseil d’Etat confirme la démarche de l’acheteur public, en rappelant que les offres déposées sont intangibles et qu’elles ne peuvent faire l’objet d’aucune modification, tant à l’initiative de l’acheteur public que du candidat.
La seule exception au principe de l’intangibilité de l’offre est donc la stricte et seule rectification d’une erreur purement matérielle.
Le Conseil d’Etat précise ainsi, de façon particulièrement détaillée, que la société candidate aurait dû se borner à confirmer son taux horaires par la simple division du montant journalier initialement proposé par le nombre d’heures de travail.
Les candidats doivent ainsi être bien conscients que la possibilité de rectifier une erreur dans son offre ouverte par le Conseil d’Etat en septembre 2011 est limitée aux seules erreurs « techniques » ou « arithmétiques ».
Ainsi, lorsqu’une entreprise candidate, interrogée après le dépôt de son offre par un acheteur public sur une imprécision de son offre, s’aperçoit qu’elle a commis une erreur dans le contenu ou la structuration de ladite offre, elle ne dispose pas de la faculté de la modifier ou de la rectifier.
La procédure de rectification de l’erreur matérielle n’est pas une séance de rattrapage d’une imperfection de l’offre au regard de l’objet du marché, mais seulement une vérification de son expression ou de sa précision de la part de l’acheteur au regard des modalités de réponse à l’appel d’offres.
Par conséquent, lorsque l’entreprise candidate est interrogée en vue de la rectification d’une erreur matérielle, elle doit elle-même s’interroger sur sa stratégie de réponse et prêter attention à la façon dont elle répond éventuellement à l’acheteur public.
Car, en effet, si la réponse est inadaptée ou inadéquate, l’offre peut être rejetée comme étant irrégulière au regard des exigences de la consultation (et en perdant en outre sa légitimité à éventuellement pouvoir contester la procédure de passation).
Alexandre Le Mière
Avocat associé