Harcèlement moral : un salarié peut être poursuivi pénalement pour complicité de harcèlement moral de salariés dont il n’est pas le supérieur

Dans un arrêt du 5 juin 2018 (Cass. crim. 17-87524) la Cour de cassation juge qu’un dirigeant salarié peut être poursuivi pénalement pour complicité de harcèlement moral de salariés dont il n’est plus le supérieur.

Les faits :

Deux directeurs de service de France Telecom sont mis en examen pour complicité de harcèlement moral car ils ont contribué à l’efficacité, pour l’ensemble du groupe, d’un plan qui a créé un climat d’insécurité permanent pour tout le personnel.

La question posée était celle de savoir si des salariés peuvent être poursuivis pour complicité de harcèlement moral de salariés qui n’étaient pas dans leur service.

La décision :

Les juges répondent par l’affirmative et considèrent que ces deux salariés ont, en participant à la mise en œuvre d’une politique d’entreprise, influé sur la situation de l’ensemble du personnel du groupe, y compris des salariés n’appartenant pas à leur service.

Les juges rappellent toutefois que la complicité doit être démontrée par « l’aide ou l’assistance » c’est-à-dire par la « contribution active » des mises en cause au processus de harcèlement.

Il est vrai que les articles 222-33-2 du Code pénal et L 1152-1 du Code du travail n’apportent pas de précision quant à l’auteur des agissements mais définissent le harcèlement moral uniquement au regard de son objet ou de ses effets, à savoir une dégradation des conditions de travail des salariés victime des agissements.

Bien qu’il soit généralement le fait de l’employeur ou d’un salarié qui abuse de son pouvoir hiérarchique, le délit de harcèlement moral peut également être caractérisé en l’absence de tout lien hiérarchique. Il peut ainsi être le fait d’un collègue ou d’un subordonné de la victime, dès lors que ses agissements ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail (Cass. crim. 6-12-2011 n° 10-82.266).

Il a également été admis qu’un tiers à l’entreprise pouvait être reconnu responsable s’il exerçait, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés (Cass. soc. 1-3-2011 n° 09-69.616 F-PB).

Conclusion :

Les juges ont une conception de plus en plus large de la notion de harcèlement moral et des auteurs de harcèlement. Il est en effet rappelé que les juges considèrent que le harcèlement peut aussi être « managérial » c’est-à-dire lié aux méthodes de gestion utilisées par l’employeur.

 

Benjamin Louzier
Avocat Associé