Ne pas confondre harcèlement et exercice du pouvoir de direction

Ne pas confondre harcèlement et exercice du pouvoir de direction.

A l’heure où les accusations de harcèlement moral se multiplient, les juges s’attachent de plus en plus à distinguer pouvoir de direction et harcèlement.

Dans un arrêt de la Chambre criminelle du 2 septembre 2014 (Cass. crim. n°13-81.626), un responsable hiérarchique était accusé de harcèlement moral par une subordonnée, occupant elle-même un poste de directeur.

La relaxe confirmée repose sur le fait que l’exercice du pouvoir de direction, qui peut impliquer une certaine rudesse, n’est pas nécessairement une manifestation d’un acte de harcèlement. Cette exigence était due à des critères objectifs précis tenant à la direction d’un service important composé essentiellement de directeurs de service, à la nécessité d’utiliser un ton directif et des méthodes managériales de suivi assez exigeantes comme une multiplicité de courriels contenant injonctions, récapitulatifs d’objectifs … Plus précisément, les juges utilisaient le concept de « pouvoir de contrôle » du responsable hiérarchique qui est apparu pour ces derniers comme normal même s’il était exercé maladroitement. 
Les juges ont relevés que les éléments suivants relevaient du pouvoir de direction et de contrôle et non du harcèlement :

  • envoi de nombreux courriels,
  • un ton directif,
  • emails de convocations ou de rappels de réunions,
  • demandes multiples de comptes rendus,
  • des demandes d’explication, qui ont pu être pressantes voire maladroites dans leur expression,
  • l’opposition des personnalités de l’ordre de l’incompatibilité professionnelle.

Dans la même optique, dans un arrêt du 23 janvier 2014 (n°13/00608), les juges de la Cour d’appel de Versailles précisent qu’il ne faut pas confondre harcèlement moral et pouvoir de direction même s’il est autoritaire et peut entraîner du stress au travail.

Ainsi dans le cadre sportif, deux clubs avaient été assignés par leurs joueurs pour rupture du contrat de travail et harcèlement moral, ce qui a donné lieu à une décision de cour d’appel dont une est très claire affirmant que :

« le harcèlement moral ne doit pas être confondu ni avec le stress au travail […] ni avec l’exercice normal du pouvoir disciplinaire de l’employeur ni encore moins avec son pouvoir de direction et d’organisation, fût-il autoritaire ».

En l’espèce les accusations du salarié reposaient essentiellement sur :

  • deux certificats médicaux,
  • un récépissé de déclaration de main courante,
  • des attestations d’anciens salariés et amis.

Il est jugé que rien ne vient démontrer que la dépression dont le salarié déclare avoir été atteint résulterait d’un harcèlement moral.

Quant aux salariés qui ont attesté en sa faveur, ils avaient eux-mêmes été sanctionnés pour d’autres faits.

 

Benjamin Louzier
Avocat Associé

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