Comment faire condamner un salarié qui demande la nullité de son forfait jours ?

A l’heure du barème Macron et de plafonnement des indemnités, certains salariés tentent de trouver des moyens d’obtenir des indemnisations complémentaires.

Dans une décision du 6 janvier 2021 (Cass. soc., 6 janv. 2021, pourvoi no 17-28.234), la Cour de cassation juge que si la convention de forfait est inapplicable (« sans effet »), le salarié doit rembourser les jours RTT dont il a bénéficié.

  1. Les faits

Un salarié signe une convention individuelle de forfait en jours puis est licencié. Il engage, par la suite, une action contentieuse aux fins, notamment, de contester le bien-fondé de son licenciement et profite de cette procédure pour solliciter des rappels d’heures supplémentaires au motif que sa convention de forfait en jours serait privée d’effet. Il considère, en effet, que son employeur n’a pas respecté les garanties de la convention collective, se rapportant notamment à l’organisation d’un entretien sur la charge de travail afin d’assurer son suivi, à l’existence d’un document de contrôle du nombre de jours travaillés, ainsi qu’au positionnement et la qualification des jours de repos.
 

  1. La décision

Par arrêt du 27 septembre 2017, la Cour d’appel de Rennes estime que, faute pour l’employeur de rapporter la preuve qu’il avait respecté les garanties imposées par la convention collective, la convention individuelle de forfait en jours devait être privée d’effet. La cour d’appel fait ensuite droit aux demandes du salarié relatives au paiement des heures supplémentaires.

Par arrêt en date du 6 janvier 2021, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu le 27 septembre 2017 par la Cour d’appel de Rennes, mais seulement en ce qu’il a débouté la société de sa demande au titre du remboursement des jours de réduction du temps de travail.

En l’espèce, la Haute juridiction considère : 

« En statuant ainsi, alors qu’elle avait retenu que la convention de forfait à laquelle le salarié était soumis était privée d’effet, en sorte que, pour la durée de la période de suspension de la convention individuelle de forfait en jours, le paiement des jours de réduction du temps de travail accordés en exécution de la convention était devenu indu, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».

La Cour, pour motiver sa décision, se fonde sur l’article 1376 du Code du civil, relatif à la répétition de l’indu, qui dispose que : « celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s’oblige à le restituer à celui de qui il l’a indûment reçu ».

Elle considère, ainsi, que si une convention de forfait en jours est privée d’effet, les jours de repos qui en découlent n’avaient pas à être octroyés au salarié et sont donc devenus indus.
 

  1. Le salarié peut être débouté de ses demandes et, en plus, condamné

Depuis l’application du barème « Macron » fixant les seuils d’indemnisation en cas de licenciement injustifié, les demandes annexes se multiplient (harcèlement, paiement d’heures supplémentaires, nullité du forfait en jours, etc.).

Avec cette décision le salarié peut être condamné à rembourser ses jours RTT sur 3 ans.

Bien plus, il peut même être débouté de ses demandes relatives au forfait jours :

  • il doit démontrer d’abord que son forfait jours est sans effet, c’est-à-dire non valable
  • il doit démontrer ensuite qu’il a accompli des heures supplémentaires en étayant sa demande par des éléments précis et fiables
  • s’il ne démontre pas avoir accompli ses heures supplémentaires : il sera débouté de ses demandes à ce titre et condamné à rembourser 3 ans de jours RTT pris indument.
  1. Comment l’employeur doit il se défendre

L’entreprise peut se défendre :
 

  • soit en demandant le remboursement de 3 ans de jours RTT au salarié : ceci si les demandes de paiement des heures supplémentaires sont totalement injustifiées.
  • soit en demandant au juge de tenir compte des jours de RTT pris, ce qui a amené le salarié à travailler 37 heures par semaine et non 35, ce qui peut réduire ses demandes de condamnation au paiement de rappel d’heures supplémentaires.

Benjamin Louzier
Avocat Associé