Destination du bail commercial : l’activité de vente à emporter enfin incluse à celle de restauration

Le preneur à bail commercial doit exploiter les locaux loués conformément à la destination stipulée dans le bail.

En matière de restauration, nombreux sont les exploitants qui s’interrogent sur le point de savoir si l’activité de restauration autorise ou non l’activité de vente à emporter et en livraison.

Cette question est d’ailleurs devenue essentielle à l’heure du développement des plateformes de livraison et des fermetures administratives des établissements recevant du public liées à la pandémie de la COVID-19.

Initialement, la jurisprudence affirmait que la vente à emporter devait être précisément stipulée dans la destination du bail, ou à tout le moins expressément autorisée par le bailleur (CA PARIS, 16 mars 2001, n°00/2549 : l’activité de vente à emporter ne peut être exercée dans un commerce de « restaurant, salon de thé, pâtisserie » ; CA PARIS, 23 mai 2001 n° 99/16524 : même solution pour un commerce de « restaurant, pizzeria, bar et brasserie »).

La Cour a eu l’occasion de se prononcer sur cette question dans le cadre d’un litige portant que le déplafonnement du loyer. En l’espèce, le bail commercial avait été conclu pour une activité de restauration et d’alimentation générale.

La Cour d’appel retient que :

  • L’activité d’alimentation générale  « peut être exercée par internet, ce qui implique que les produits puissent être livrés à la clientèle que ce soit par un service de livraison dédiée ou par l’intermédiaire d’une plateforme » et « autorise donc [le Preneur] à vendre des plats cuisinés à emporter ou vendus par internet et livrés aux particuliers et aux ménages » ;
  • Sur l’activité de restauration, « si les plats confectionnés sont essentiellement destinés à une consommation sur place, la tendance croissante est de permettre à la clientèle, particulièrement en milieu urbain, comme en l’espèce, de pouvoir emporter les plats cuisinés par les restaurants ou se les faire livrer à domicile, notamment par l’intermédiaire des plateformes. Au demeurant, même si les clauses de destination des baux ne sont pas connues, [le Preneur] justifie que des restaurants de spécialités asiatiques, notamment japonaises, environnants proposent également la livraison par internet ».

En conséquence, les activités de vente à emporter de plats confectionnés et cuisinés sur place et de vente de ces plats par internet avec livraison constituent une modalité particulière d’exploitation de l’activité de restauration combinée à celle d’alimentation générale, et donc d’activités incluses dans la destination contractuelle.

Nous saluons cette décision très attendue actant de l’évolution des usages commerciaux en matière de restauration.

CA PARIS 17 févr. 2021, n°18/07905

Julie Janvier
Avocate Associée

Marie Hannebicque
Avocate