Que doit faire l’employeur en cas de perquisition dans l’entreprise par l’Inspection du travail ou la Police ?

PREMIERS RÉFLEXES

  • noter l’identité et la qualité des enquêteurs, sans oublier de vérifier la présence obligatoire d’un officier de police judiciaire (OPJ) lorsque c’est la police
  • prévenir immédiatement la personne qui représentera l’entreprise au cours de la perquisition. Il peut s’agir du représentant légal ou de toute autre personne désignée comme habilitée à représenter l’entreprise. En pratique, c’est souvent le directeur juridique ou le DRH pour les infractions de droit du travail : importance de faire des délégations de pouvoirs en amont
  • veiller à ce que quelqu’un reste avec eux.
  • faire noter tout ce qui parait anormal

 
APPEL DE L’AVOCAT

En matière de perquisition judiciaire, aucun texte ne prévoit, ni n’exclut, la présence de l’avocat lors des opérations. En pratique, certains enquêteurs continuent à s’y opposer, auquel cas il est recommandé de faire acter ce refus au procès-verbal.
En tout état de cause, il est impératif de prévenir l’avocat de la perquisition en cours et de lui transmettre toutes les informations sur le cadre et le déroulé des opérations.
 
RÔLE ACTIF DU REPRÉSENTANT DE L’ENTREPRISE AU COURS LA PERQUISITION

Demander le cadre légal de la perquisition et la présentation du titre autorisant les enquêteurs à pénétrer dans les locaux de l’entreprise.
Ces deux critères déterminent en effet l’étendue des droits des enquêteurs :

  • en matière d’enquête de flagrance, la perquisition peut se dérouler sans l’accord de la personne concernée. Ce sera très souvent le cas pour les infractions relatives au travail illégal ;
  • en matière d’enquête préliminaire :
    • l’accord du représentant de l’entreprise est nécessaire et ce dernier peut donc refuser la perquisition. Néanmoins, les enquêteurs pourront solliciter une autorisation spéciale du Juge des libertés et de la détention pour passer outre ce refus si le délit concerné est puni d’au moins trois ans d’emprisonnement  (exemple : délits de travail dissimulé, de discrimination, accidents du travail les plus graves, harcèlement commis avec deux circonstances aggravantes),
    • si les enquêteurs font état d’une autorisation spéciale du JLD, il n’est pas possible de s’opposer à la perquisition ;
  • en matière d’information judiciaire, la perquisition est réalisée par des OPJ (assistés par des APJ) agissant sur commission rogatoire du juge d’instruction sans que l’assentiment du représentant de la société ne soit requis.

CE QUE PEUVENT FAIRE OU NE PAS FAIRE LES ENQUÊTEURS PENDANT LA PERQUISITION

Les enquêteurs peuvent :

  • solliciter des explications pratiques sur la disposition des locaux, la localisation de certains dossiers ou l’identité des personnes présentes. Refuser de répondre expose l’entreprise au délit d’entrave. Il leur est en revanche interdit de solliciter sans précision la remise de documents susceptibles de prouver la ou les infractions objets de l’enquête. Il en va du respect du principe selon lequel tout accusé a le droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination (CJCE, 18 oct. 1989, aff. C-374/87, arrêt dit Orkem : « La commission ne saurait imposer à l’entreprise l’obligation de fournir des réponses par lesquelles celle-ci serait amenée à admettre l’existence de l’infraction dont il appartient à la commission d’établir la preuve »)
  • saisir les pièces et documents utiles à la manifestation de la vérité, quel que soit leur support, lesquels sont inventoriés et placés sous scellés. Les enquêteurs ne peuvent en revanche ni consulter, ni saisir les documents couverts par la confidentialité des correspondances entre la société et ses avocats, pas plus que les documents classifiés « secret-défense » ;
  • interroger toute personne susceptible d’apporter des informations utiles à l’enquête ;
  • réaliser une perquisition du bureau personnel du dirigeant en sa présence ou en présence d’un représentant de son choix. À défaut, deux témoins seront désignés par les enquêteurs pour y assister.

Au cours de la visite, il est recommandé de :

  • veiller à ce que les enquêteurs soient toujours accompagnés d’un membre de l’entreprise ;
  • prendre note des documents saisis (aucune copie du procès-verbal ne sera remise à l’entreprise) et, dans la mesure du possible, prendre copie de ces documents afin de conserver un dossier équivalent à celui des enquêteurs ;
  • coopérer en répondant aux demandes des enquêteurs, sans toutefois fournir spontanément des documents ou des explications non sollicités.

 
PRÉCAUTIONS À PRENDRE À L’ISSUE DE LA PERQUISITION

L’ensemble des constatations, des déclarations, ainsi que l’inventaire des documents saisis sont mentionnés dans un procès-verbal signé par les enquêteurs et par le représentant de l’entreprise.
Il est crucial de relire attentivement le PV afin d’en contrôler l’exactitude, de proposer les modifications nécessaires et de faire état de toute difficulté sous forme de réserve. La faculté de refuser de signer le procès-verbal doit être réservée au seul cas où une dénaturation grave du déroulé des opérations serait constatée.

Benjamin Louzier
Avocat Associé