Pratiques restrictives de concurrence : publication par la CEPC du bilan annuel de la DGCCRF relatif à la jurisprudence civile, administrative et pénale

Le 29 novembre 2019, la CEPC a publié sur son site internet le bilan de la DGCCRF relatif à la jurisprudence civile, administrative et pénale rendue en 2018 en matière de pratiques restrictives de concurrence (https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/cepc/etude/bilan_cepc_2018_finale.pdf).

Concernant la jurisprudence civile, 14 décisions intéressant les pratiques restrictives de concurrence « civiles » – dont 8 concernant des questions de procédure (recevabilité de l’action du Ministre, questions prioritaires de constitutionnalité, etc.) – ont été rendues en 2018 dans des contentieux ayant tous pour origine une action du Ministre de l’Economie.

A cette occasion, les juges ont prononcé un montant total d’amendes civiles de 450.000 €. En revanche, aucun indu n’a été prononcé en 2018 si ce n’est la confirmation par la Cour de cassation d’un montant d’indu s’élevant à 76.871.390,28 euros prononcé par un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 29 juin 2016 et comptabilisé dans le bilan de 2016.

En matière de déséquilibre significatif, la DGCCRF relève que les apports de la jurisprudence ont consisté à « préciser le champ d’application de l’article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce », à « préciser les notions de soumission et de tentative de soumission », à « illustrer les obligations pouvant créer un déséquilibre dans les droits et obligations des parties » et à « confirmer la conformité des dispositions de l’article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ». S’agissant des critères de soumission et de tentative de soumission à un déséquilibre significatif, l’Administration retient que deux critères ont été mis en avant par la jurisprudence : (i) la démonstration d’une absence de négociation effective des clauses ou pratiques incriminées ou (ii) l’usage de de menaces ou de mesures de rétorsion visant à forcer l’acceptation. S’agissant de l’appréciation du déséquilibre significatif, l’Administration note que ce déséquilibre peut se déduire (i) d’une absence totale de réciprocité à une obligation, (ii) d’une absence totale de contrepartie à une obligation ou encore (iii) de la disproportion importante entre les obligations respectives des parties, et rappelle le principe selon lequel la clause significativement déséquilibrée peut être rééquilibrée par d’autres clauses du contrat, sous réserve pour l’entreprise mise en cause de démontrer ce rééquilibrage.

Concernant la jurisprudence pénale, 15 jugements et 2 arrêts ont été rendus en 2018, lesquels concernaient exclusivement des contentieux relatifs aux règles de facturation (ancien art. L. 441-3 C.com.).

A cette occasion, les juges ont prononcé un montant total d’amendes pénales de 342.000 €, soit un montant inférieur à celui de 2017 (599.360 €).

La DGCCRF relève que 98 dossiers n’ont pas donné lieu à des décisions judiciaires, ayant fait l’objet de transactions, pour un montant total de 1.153.020 € (contre 713.510 € en 2017 et 440.363 € en 2016).

A noter que l’Administration n’a dressé en 2018 que 4 procès-verbaux en matière de revente à perte (ancien art. L. 442-2 C.com.).

Concernant la jurisprudence administrative, 377 procédures d’amendes (contre 230 en 2017), représentant au total près de 29,1 M€ (contre 14.700.000 € en 2017), ont été initiées en matière de délais de paiement (ancien art. L. 441-6 C.com.), dont :

  • 263 amendes notifiées aux personnes en cause, représentant une somme de 17,2 M€ ;
  • 114 procédures d’amendes en cours, dont le total atteint 11,9 M€.

La DGCCRF souligne que « plus de 2.700 établissements ont été contrôlés » en matière de délais de paiement, parmi lesquels 683 « présentaient des anomalies », ce qui « correspond à un taux de 25,1% ».

Elle relève également que :

  • 30 recours administratifs ont été introduits par des entreprises sanctionnées pour non-respect des dispositions relatives aux délais de paiement, dont 14 ont été portés devant le Ministre en charge de l’économie dans le cadre d’un recours hiérarchique et les 16 autres, devant l’auteur de la décision querellée dans le cadre d’un recours gracieux
  • 16 recours contentieux ont été introduits devant les juridictions administratives afin de solliciter l’annulation de la décision ou la réduction du montant de l’amende prononcée.

A noter que 14 décisions ont été rendues par des juridictions administratives : 4 décisions de sanction de l’Administration ont été annulées par le juge administratif, 2 ont été censurées partiellement pour disproportion manifeste de la sanction et 7 ont été validées.

Sur le fond, il a notamment été retenu que :

  • La DIRECCTE n’avait pas commis d’erreur dans l’appréciation des faits et du droit en prononçant une sanction non pas à l’encontre de la société contrôlée, filiale d’un groupe de sociétés, mais à l’encontre de sa société mère, « auteur des véritables manquements », dès lors que « la société contrôlée était presque intégralement détenue par la société mère, laquelle en assurait par ailleurs la gestion » (TA Lyon, 1er mars 2018, req. 1604528) ;
  • La DIRECCTE a commis une erreur de droit en sanctionnant un franchiseur pour avoir consenti à certains de ses franchisés des délais de paiement excédant ceux fixés par les dispositions légales (TA Lyon, 27 décembre 2018, req. 1708355).

Régis Pihery
Avocat associé
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