Les objectifs d’un mandataire social doivent être définis : à défaut, la sanction financière peut être lourde

Les objectifs d’un mandataire social doivent être définis : à défaut, la sanction financière peut être lourde.

CA Paris, 26 mai 2016, n°14/20147, ch. 5-9, Sté Réponse Invest c/ L.

La Cour d’appel de Paris a jugé, dans un arrêt rendu le 26 mai 2016, qu’avait commis une faute la société anonyme ayant décidé d’octroyer une rémunération variable au président du directoire sans pour autant définir les objectifs à atteindre pour la percevoir.

En l’espèce, le président du directoire n’avait pas perçu de rémunération variable au cours du dernier exercice pendant lequel il avait exercé ses fonctions, avant d’être révoqué. Le principe de cette rémunération variable avait pourtant été décidé par le conseil de surveillance de la société au cours de la réunion qui avait arrêté le montant de sa rémunération fixe, le procès-verbal de cette réunion ayant prévu que ladite rémunération variable serait déterminée avant le 31 mars de chaque année, et conditionnée à l’atteinte d’objectifs de nature qualitative et quantitative, que la société s’engageait à définir. 

L’année de sa révocation, aucun objectif n’ayant été défini par la société, le dirigeant n’avait pas perçu de rémunération variable.

La société, pour justifier sa position, évoquait (i) les difficultés économiques rencontrées, et (ii) l’absence d’accord trouvé avec le président au sujet des objectifs, les négociations entreprises à cette fin n’ayant pas abouti.

La Cour d’appel de Paris rejette ces arguments et condamne la société à verser au dirigeant une somme correspondant au montant de la rémunération variable perçue au cours de l’année précédente (au prorata de son temps de présence au cours de la dernière année d’exercice de ses fonctions), au motif :

  • que la société a commis une faute en ne respectant pas son engagement de définition annuelle des objectifs ; et
  • que le mauvais état financier de la société ne pouvait être utilement invoqué.

La Cour d’appel de Paris tend ainsi vers un rapprochement des règles applicables au dirigeant non salarié de celles applicables aux salariés (mandataires sociaux ou non).

Ce principe s’applique à toutes les formes de sociétés.

Conclusion : il convient de porter une attention toute particulière à la définition des objectifs conditionnant le versement d’une rémunération variable au dirigeant non salarié. Aussi, en présence d’un principe acquis de rémunération annuelle variable, il est conseillé :

  • de prévoir une réunion, chaque année à date fixe, de l’organe collégial en charge de la fixation des objectifs ;
  • d’éviter de faire référence à des négociations avec le dirigeant dans la décision initiale actant le principe de la rémunération variable, afin d’éviter l’écueil de l’impossible accord ultérieur sur le contenu de tels objectifs ; et
  • si la référence à de telles négociations était prévue dans la décision initiale, ou si la pratique usuelle en vigueur au sein de la société passe par une phase préalable de négociation avec le dirigeant, de passer outre le désaccord éventuel pouvant exister avec celui-ci, et de faire adopter les objectifs par l’organe collégial, seul compétent juridiquement pour le faire.

 

Jérôme Albertin
Avocat à la Cour

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