COVID 19 : réponses pratiques aux questions le plus souvent posées !

Un salarié infecté par le Covid-19 peut-il considérer qu’il est victime d’un accident du travail ?

Tout dépend des circonstances.

La reconnaissance d’un accident du travail suppose l’existence d’un fait ou d’un ensemble de faits précis survenus soudainement, à une date et dans des circonstances certaines. Cela exclut en principe les maladies contagieuses contractées à l’occasion du travail.

S’agissant du Covid-19, un contact rapproché avec une personne infectée (contact physique, crachat, éternuement, toux, etc.) pourrait sans doute constituer un tel « fait accidentel », susceptible d’entraîner l’application de la présomption d’imputabilité. Le simple fait d’être en contact régulier avec d’autres personnes (clientèle, autres salariés, personnel extérieur) ne devrait en revanche pas suffire à caractériser un tel « fait », sous réserve que l’établissement concerné ait pris les mesures de prévention recommandées. Les tribunaux auront sans doute l’occasion de trancher cette question.

Quoi qu’il en soit, l’employeur n’a pas à se faire juge de la qualification d’accident du travail. Il doit déclarer l’accident à la CPAM dans le délai de 48 heures à compter du jour où il en a eu connaissance ; quitte à assortir sa déclaration de nombreuses réserves.
 
Doit-on encore faire des déclarations d’activité partielle par établissement ?

NON en pratique.

Selon le questions-réponses sur l’activité partielle du ministère du Travail, mis à jour le 29 mars, les entreprises dont plusieurs établissements sont concernés pourront réaliser leurs demandes en une seule fois. L’obligation faite de formuler une demande d’autorisation par établissement n’a pas été supprimée par le récent décret. Pour simplifier les démarches, le portail de l’activité partielle va cependant être adapté en avril : un utilisateur pourra télécharger en une seule fois les données requises pour l’ensemble de ses demandes. Cette faculté est déjà ouverte mais limitée en nombre d’établissements et de salariés (200 SIRET par compte et 1 000 lignes par fichier). Elle sera donc étendue.
 
 
Est-il possible de réserver la prime « Macron » aux salariés se rendant sur leur lieu de travail ?

NON pas pour le moment.

Néanmoins, la loi d’urgence prévoit que le gouvernement est autorisé « à modifier la date limite et les conditions de versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat », ce qui pourrait permettre, outre l’abandon de la nécessité d’avoir conclu un accord d’intéressement (abandon déjà annoncé par la ministre du Travail), d’ouvrir la possibilité de réserver le paiement de la prime (PEPA) aux salariés spécifiquement exposés au risque de contamination de par la nature de leur activité.
 
Peut-on interrompre les CDD en cours en invoquant la force majeure ?

La réponse est nuancée.

La force majeure s’entend de la survenance d’un événement, extérieur, imprévisible lors de la conclusion du contrat, et irrésistible dans son exécution (C. civ., art. 1218).

En matière sociale, la notion de force majeure est appréciée strictement par les tribunaux et rarement retenue. Les juges français ont par ailleurs été réticents, par le passé, à qualifier de force majeure une épidémie (épidémie de grippe H1N1 de 2009 : CA Besançon, 8 janv. 2014, no 12/0229 ; virus de la dengue : CA Nancy, 22 nov. 2010, no 09/00003).

Il est vrai que l’ampleur de la crise sanitaire et de ses conséquences pourrait conduire à la qualifier de cas de force majeure, ce qu’a fait d’ailleurs le gouvernement pour les marchés publics (voir FAQ du ministère de l’Économie).

Néanmoins compte tenu des aides massives mises en œuvre par le gouvernement, notamment dans le cadre de l’activité partielle dont bénéficient les salariés en CDD, le caractère irrésistible serait contestable.

Ceci étant le pouvoir exécutif a écrit dans plusieurs textes qu’il s’agissait d’un cas de force majeure. N’est ce pas de ce fait un cas de force majeure par détermination de « la loi « ?

Les juges devront trancher mais les deux thèses se tiennent.
 
Les salariés en télétravail ont-ils droit aux tickets-restaurants ?

OUI, sous condition.

L’Urssaf et la CNTR (Commission nationale des titres-restaurants) considèrent que les télétravailleurs doivent bénéficier de titres-restaurants comme les autres salariés, sous réserve que leur journée soit organisée en deux vacations, entrecoupées d’une pause réservée à la prise d’un repas, et qu’ils remplissent les autres conditions applicables.

Cette position se fonde sur une lecture combinée :
 

  • de l’article L. 1222-9 III du Code du travail, qui prévoit que les télétravailleurs ont « les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise » ;
  • et de l’article R. 3262-7 du Code du travail, qui dispose qu’un « même salarié ne peut recevoir qu’un titre-restaurant par repas compris dans son horaire de travail journalier ».

 
L’activité partielle peut-elle être mise en œuvre avant la demande et/ou l’autorisation de l’administration ?

OUI

Le décret du 25 mars 2020 le prévoit: les entreprises peuvent déposer leur demande d’autorisation jusqu’à 30 jours après le début réel de l’activité partielle, avec effet rétroactif.
 
Est-il possible de faire varier le niveau d’activité partielle (chômage à 100 % ou chômage de quelques heures par jour) entre les services ?

OUI

L’activité partielle est une mesure collective consistant soit à fermer temporairement un établissement ou partie d’établissement, soit à réduire l’horaire de travail pratiqué dans l’établissement.

La notion d’établissement est toutefois entendue ici au sens large : il peut s’agir d’une unité de production, d’un service, d’un atelier, d’une équipe chargée de la réalisation d’un projet notamment en matière de prestations intellectuelles (Doc. Tech. DGEFP, 1er juill. 2015). Il est donc possible de fermer totalement certains services, d’en laisser ouverts d’autres ou d’en réduire l’horaire.
 
Les cadres dirigeants salariés sont-ils éligibles à l’activité partielle ?

On ne parle que des salariés ou mandataires sociaux qui cumulent leur mandat avec un contrat de travail (à défaut les mandataires sociaux n’ont droit à rien…)

La réponse est incertaine.

Il semble que non en l’état de la législation car ils ne sont pas soumis à la législation sur le temps de travail (en ce sens, FAQ du ministère de l’Économie du 19 mars 2020). Ce dispositif pourrait toutefois leur être étendu comme cela a été fait pour les cadres en forfait jours.

Ceci étant le statut de Cadre dirigeant peut être contesté et bien souvent les bulletins de paie mentionnent un horaire de travail. Il nous semble donc qu’il pourrait en bénéficier.
 
Pour les arrêts maladie en cours : l’activité partielle prévaut-elle sur l’arrêt de travail ou commencera-t-elle à l’issue de l’arrêt de travail ?

C’est la première cause de suspension qui s’applique.

Le salarié absent pour maladie continuera à être traité en arrêt de travail jusqu’au terme de celui-ci, date à laquelle il « basculera » en activité partielle. La question se pose toutefois de savoir s’il est possible de limiter le maintien de salaire en tenant compte de la réduction d’activité dans le service du salarié concerné. Il semble que la réponse soit positive.
 
Pour les intérimaires, qui doit faire la demande ?

Le bénéfice de l’activité partielle pour les intérimaires est possible si l’établissement de l’entreprise utilisatrice au sein duquel ils sont en mission a lui-même placé en activité partielle ses propres salariés permanents.

Le nombre d’heures sollicité par l’entreprise utilisatrice au titre de l’activité partielle n’a pas à couvrir les intérimaires. Il appartient à l’entreprise de travail temporaire (ETT) de faire elle-même la demande d’activité partielle pour ses intérimaires en joignant une copie du récapitulatif de la demande d’activité partielle effectuée par l’entreprise cliente pour la période concernée, ainsi qu’une copie de l’avis du CSE de cette dernière.
 
Les cotisations prévoyance-frais de santé doivent-elles être maintenues pendant l’activité partielle ?

OUI

Sauf dispositions particulières prévues au contrat d’assurance (maintien à titre gratuit par exemple) :

  • les salariés devraient continuer à bénéficier des régimes en vigueur dans l’entreprise ;
  • ils devraient s’acquitter de la part salariale de la cotisation calculée selon les règles « habituelles » ; l’employeur continuant de prendre en charge sa quote-part des cotisations.

En pratique, un tel maintien ne soulève pas de difficultés s’agissant des régimes « frais de santé » généralement financés par une cotisation forfaitaire fixée en pourcentage du plafond de la sécurité sociale. En revanche, se pose la question de l’assiette des cotisations (et corrélativement de celle des prestations) s’agissant des régimes de prévoyance incapacité-invalidité-décès.

Si en la matière, il est préconisé de cotiser a minima sur la base de l’allocation d’activité partielle (et bien évidemment sur la part de salaire rémunérant les heures non chômées en cas de réduction de l’horaire), il peut également être envisagé de cotiser sur la base d’un salaire reconstitué à 100 % afin de ne pas impacter le montant des prestations futures. Dans tous les cas, il est recommandé aux entreprises de prendre connaissance au plus tôt des dispositions contractuelles afin de vérifier ce qu’elles prévoient en la matière avant, le cas échéant, de contacter leur assureur pour l’interroger sur les options qui s’offrent à elles.
 
Les salariés acquièrent-ils des droits à retraite au titre des périodes d’activité partielle ?

Non, dans le régime général de la sécurité sociale, l’allocation d’activité partielle n’étant pas soumise aux cotisations « vieillesse » et les périodes d’activité partielle n’étant pas assimilées à des périodes « cotisées » par la réglementation. En pratique, cela n’a toutefois généralement que peu d’impact dès lors qu’il suffit de cotiser sur la base de 150 fois le Smic horaire (soit 1 522,50 € en 2020) pour acquérir un trimestre d’assurance et qu’il ne peut être retenu plus de quatre trimestres par année civile.

Oui, dans le régime complémentaire Agirc-Arrco, à la double condition :

  • que les périodes sans activité aient été indemnisées par l’employeur;
  • que leur durée dépasse 60 heures dans l’année civile.

Benjamin Louzier
Avocat Associé