Propos dénigrants tenus par un salarié sur Facebook : peut-on licencier ?

Dans une décision du 12 septembre 2018 (nº 16-11.690 FS-PB), la Cour de cassation juge opère une distinction entre les propos à caractère public (rendus accessibles au plus grand nombre), et ceux d’ordre privé, tenus dans un cercle restreint auquel ne peuvent accéder que des personnes qui y sont autorisées par le titulaire du compte.

S’agissant de propos accessibles à un groupe fermé de seulement 14 membres, la Cour de cassation écarte la faute grave et la cause réelle et sérieuse de licenciement.

Les faits :

Un salarié est licencié pour faute grave pour avoir tenu sur Facebook, des propos injurieux et menaçants à l’égard de son supérieure hiérarchique.

Un procès-verbal de constat d’huissier établissait qu’il avait adhéré à un groupe sur Facebook, intitulé « extermination des directrices chieuses ».

Il s’agissait toutefois d’un groupe fermé, accessible uniquement à des personnes « agréées » (14 personnes).

Pour l’employeur, la seule diffusion de ces propos sur un réseau social justifiait un licenciement pour faute grave.

La décision :

Pour la Cour d’appel de Paris tout dépendait du caractère public ou privé des propos litigieux.

En l’espèce :

  • les propos n’étaient accessibles « qu’à des personnes agréées par le titulaire du compte et fort peu nombreuses ».
  • ceux-ci relevaient donc d’une « conversation de nature privée »

La faute grave a donc été écartée.

La Cour de cassation a approuvé le raisonnement des juges d’appel:

« ayant constaté que les propos avaient été diffusés sur le compte ouvert par la salariée sur le site Facebook et qu’ils n’avaient été accessibles qu’à des personnes agréées par cette dernière et peu nombreuses, à savoir un groupe fermé composé de 14 personnes, de sorte qu’ils relevaient d’une conversation de nature privée, la cour d’appel a pu retenir que ces propos ne caractérisaient pas une faute grave ».

Conclusion :

Si les propos sont tenus sur un groupe fermé : impossible de licencier ni même de sanctionner.

Par contre en l’absence de paramétrage de ces données de confidentialité, l’employeur peut sanctionner car les propos sont publics.

Ainsi, la faute grave a été validée pour des insultes sur un mur dont l’accès n’avait pas été limité aux seuls « amis » agréés, de sorte qu’elles pouvaient être visibles par les clients ou d’autres salariés (CA Aix-en-Provence, 27 mars 2015, nº 13/20847) ou lorsque le profil du salarié comporte un nombre « d’amis » (179 en l’occurrence) dont l’importance ne permet pas de caractériser une sphère privée d’échanges (CA Aix-en-Provence, 5 février 2016, nº 14/13717)

 

Benjamin Louzier
Avocat Associé