Harcèlement moral : le salarié doit le prouver par des faits « précis et concordants »
Les accusations de harcèlement moral se multiplient dans les entreprises. Cela oblige l’employeur à contre attaquer (diffamation, dénonciation calomnieuse, etc.) mais surtout à se défendre.
Cela donne l’occasion de rappeler que la charge de la preuve pèse en partie mais d’abord sur le salarié.
En effet, tous les praticiens connaissent bien le dispositif prévu par l’article L. 1 154-1 du Code du travail, qui concerne le harcèlement moral comme le harcèlement sexuel, selon lequel le salarié :
« établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement », à charge alors pour l’employeur de « prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ».
Si le harcèlement lui-même n’a pas à être démontré, les faits qui le laissent présumer doivent l’être.
Mais le Conseil constitutionnel a ajouté une précision, souvent négligée.
Au considérant 89 de la décision fleuve (Déc. N°2001-455 DC, 12 janv. 2002), il énonce :
« que les règles de preuve plus favorables à la partie demanderesse instaurées par les dispositions critiquées ne sauraient dispenser celle-ci d’établir la matérialité des éléments de fait précis et concordants qu’elle présente au soutien de l’allégation selon laquelle la décisions prise à son égard […] procèderait d’un harcèlement moral ou sexuel au travail […] ».
Ainsi, le salarié doit établir des faits « précis et concordants ».
Exemples :
- Un témoignage se bornant à accuser untel de harcèlement moral n’est pas précis.
- Non plus que la narration d’événements sans date ni protagonistes dénommés.
- Un PV de CHSCT faisant état de tensions dans un service ne concorde pas, en soi, avec les accusations d’un salarié dirigé contre le responsable de ce service.
- Un événement isolé susceptible de caractériser un harcèlement devra être écarté s’il ne concorde pas avec d’autres faits également passibles de l’article L. 1152-1.
En conclusion : les plaideurs doivent rappeler aux juges cette notion de faits « précis et concordants ».
Benjamin Louzier
Avocat Associé