Bases de données : mieux vaut de bonnes conditions générales d’utilisation qu’une protection par le droit d’auteur !

Bases de données : mieux vaut de bonnes conditions générales d’utilisation qu’une protection par le droit d’auteur !          

Dans son arrêt du 15 janvier 2015 (Affaire C-30/14), la Cour de Justice de l’Union Européenne est venue répondre à une question préjudicielle portant sur l’interprétation de la directive 96/9/CE concernant la protection juridique des bases de données.

Le litige avait été initié par Ryanair Ltd contre PR Aviation BV (société néerlandaise) qui utilisait sans autorisation à des fins commerciales des données provenant du site internet de Ryanair, en violation notamment de ses conditions générales d’utilisation du site que PR Aviation avait acceptées.

La directive précise qu’une base de données peut être protégée sur le fondement du droit d’auteur (lorsque le choix ou la disposition des matières constituent une création intellectuelle propre) ou par le droit sui generis (lorsque l’obtention, la vérification ou la présentation du contenu attestent un investissement substantiel qualitatif ou quantitatif).

Néanmoins la notion d’ « utilisateur légitime » est également prévue et permet l’utilisation, dans certaines circonstances, du contenu de la base sans autorisation de l’auteur ou du fabriquant et sans qu’une disposition contractuelle puisse faire échec à ce droit.

La Cour d’Appel d’Amsterdam a considéré que PR Aviation faisait une utilisation légitime de la base de données que constitue le site internet de Ryanair qui ne pouvait pas être contractuellement limitée par les conditions générales de cette dernière.

Ryanair a formé un pourvoi devant la Cour Suprême des Pays-Bas par lequel elle prétendait (i) bénéficier d’une protection au titre du droit d’auteur et (ii) que PR Aviation avait violé l’interdiction contractuelle contenue dans les conditions générales selon laquelle aucun extraction à des fins commerciales ne pouvait être réalisée en dehors d’une licence conclue avec Ryanair.

La Cour Suprême ayant conclu qu’aucune protection par le droit d’auteur n’étant caractérisée en l’espèce, elle a posé une question préjudicielle à la CJUE quant à la liberté de limiter contractuellement l’utilisation d’une base de donnée qui n’est ni protégée par le droit d’auteur ni par le droit sui generis.

La CJUE a répondu qu’en effet, la directive 96/9/CE ne s’applique qu’aux bases de données protégeables au titre du droit d’auteur ou du droit sui generis et qu’à défaut, le créateur d’une base peut établir des limitations contractuelles à son utilisation par des tiers.

La logique juridique est implacable : le champ d’application de la directive n’englobe pas les bases de données qui ne sont pas protégées par les mécanismes qu’elle prévoit. La logique économique l’est moins : le créateur d’un base de données protégées par la directive, dans le faits, ne jouit pas de la même liberté contractuelle de limiter les droits des utilisateurs de la base, dès lors que la directive a consacré le caractère impératif de l’utilisation légitime !

En conclusion : les sites internet ont tout intérêt à rédiger et faire accepter des conditions générales d’utilisation limitant strictement l’utilisation des données qu’il contient. Soit la base est protégée et les dispositions seront considérées comme nulles et non avenues, soit la base n’est pas protégée et la limitation contractuelle s’appliquera.

Emmanuelle BEHR
Avocat à la Cour
Associée

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