Reprise de la commercialisation d’Orange Sports : la fin de l’interdiction générale de la vente subordonnée ?
Par un arrêt du 14 mai 2009, la Cour d’Appel de Paris a infirmé le jugement du Tribunal de Commerce qui avait considéré qu’en subordonnant l’abonnement à Orange Foot à la souscription d’un abonnement à Internet haut débit Orange, France Télécom et Orange se livraient à une vente liée interdite par l’article L. 122-1 du Code de la consommation.
La Cour d’Appel de Paris se fonde sur la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs qui, dans la liste des pratiques interdites en toutes circonstances, n’inclue pas la vente subordonnée.
Or, l’article L. 122-1 du Code de la consommation dispose qu’il est interdit « de subordonner la vente d’un produit ou l’achat d’une quantité imposée ou l’achat concomitant d’un autre produit ou d’un autre service ainsi que de subordonner la prestation d’un service à celle d’un autre service ou à l’achat d’un produit ».
La Cour reprend la réponse de la CJCE dans une affaire récente portant sur un problème similaire posé par la législation belge (C-261/07 et C-299-07), selon laquelle la directive doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale qui, sauf certaines exception et sans tenir compte des circonstances spécifiques du cas d’espèce, interdit tout offre conjointe faite par un vendeur à un consommateur.
Plutôt que d’écarter la loi française comme incompatible avec le droit communautaire, la Cour d’Appel l’interprète dans un sens qui la rende conforme et qui assure la pleine effectivité de la directive. Elle étudie donc la pratique litigieuse de France Télécom à la lumière de la directive afin de voir si elle constitue une pratique déloyale, c’est-à-dire qui est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen par rapport au produit.
La Cour en conclue que le seul fait qu’un consommateur doivent souscrire à un abonnement ADSL Orange pour obtenir l’accès à la chaîne Orange Sports ne répond pas à la notion de pratique déloyale de la directive. L’ensemble des opérateurs du marché de la télévision payante cherche à offrir des services innovants ou à l’acquisition de droits exclusifs. Le consommateur se détermine donc en considération des services associés aux abonnements ADSL et de la différenciation par rapport aux offres concurrente. L’essentiel est que le consommateur soit libre de ne pas souscrire à certaines offres ce qui est le cas pour la chaîne Orange Sports.
Cet arrêt impose donc désormais un examen au cas par cas des pratiques de vente subordonnée en considération des circonstances de chaque espèce afin de déterminer si elles constituent ou non une pratique commerciale déloyale interdite.
Emmanuelle BEHR
Avocat à la Cour