COVID 19 – Peut-on organiser un entretien préalable par téléphone/zoom/Skype, etc ? Oui

S’il est de principe que l’entretien préalable à licenciement doit se tenir en présence physique des parties, les circonstances peuvent légitimer l’organisation d’un entretien via une téléconférence, zoom, Skype, etc.

Ces modalités ne constituent pas une irrégularité de procédure dès lors que les circonstances le justifient, que les droits du salarié ont été respectés et que ce dernier a été en mesure de se défendre utilement.
Ceci a été récemment jugé (CA Versailles, 6ème ch., 4 juin 2020, no 17/04940) et différentes textes vont dans ce sens.

  1. Les faits

Une salariée, détachée à Dubaï, fait l’objet d’une mesure de licenciement. Dans le cadre de la procédure de licenciement, l’entretien préalable a été organisé par téléconférence. La salariée saisit le conseil de prud’hommes, notamment en contestation de son licenciement mais également de la régularité de la procédure.

  1. La décision

Par arrêt en date du 4 juin 2020, la Cour d’appel déboute la salariée de sa demande d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement.

Aux termes de sa décision, la cour d’appel rappelle, dans un premier temps, le principe selon lequel l’entretien préalable doit se tenir en présence physique des parties. Puis, dans un second temps, elle introduit une exception à ce principe en admettant la possibilité d’organiser un entretien à distance par téléconférence sous réserve que les conditions cumulatives suivantes soient réunies : les circonstances de l’espèce le justifient, les droits du salarié sont respectés et ce dernier a été en mesure de se défendre utilement. Au cas d’espèce, la cour d’appel considère que les conditions précitées sont réunies et que la procédure est régulière.

  • le statut d’expatriée de la salariée et sa localisation à Dubaï, alors que la Direction se trouve en France, justifiaient, que l’entretien puisse se tenir à distance par téléconférence.
  • S’agissant de la préservation des droits de la salariée et de sa possibilité de se défendre utilement, la Cour relève que ces derniers ont été respectés dès lors que la salariée était assistée par une personne en France et par une autre personne à Dubaï, que l’entretien a duré une heure, que le représentant de la salariée à Dubaï a retranscrit l’ensemble de l’entretien dans un compte-rendu précis, que les prises de paroles du représentant de la salariée en France et du représentant de l’employeur ont fait l’objet d’observations et d’interrogations de la part du représentant de la salariée à Dubaï, que la salariée a indiqué qu’elle ne souhaitait pas intervenir et qu’elle réservait sa réponse pour une date ultérieure.

La Cour de cassation n’a pas (encore) admis cette possibilité, mais elle devrait aller dans le même sens.
 

  1. Quoi qu’il en soit : l’enjeu est faible

L’enjeu est faible car l’indemnité en cas d’irrégularité de la procédure de licenciement est plafonnée à un mois de salaire et ne peut se cumuler avec l’indemnité pour licenciement abusif (C. trav., art. L. 1235-2).
 

  1. Plusieurs textes vont dans le sens de l’autorisation de l’entretien à distance pendant la pandémie de Covid 19

L’Ordonnance du 1er avril 2020 a autorisé le recours à la visioconférence pour toutes les réunions du CSE durant l’état d’urgence sanitaire.

La Ministre du travail a également considéré que : « rien ne s’oppose à ce que l’entretien professionnel soit réalisé sous forme de visioconférence » (Question/Réponse publié le 20 mai 2020 par le Ministère du travail).

Une instruction de la Direction Générale du Travail du 17 mars 2020 a autorisé le recours à la visioconférence ou au téléphone dans le cadre de l’enquête contradictoire menée pour les demandes d’autorisation de licenciement ou de transferts de contrat de travail des salariés protégés (Instruction DGT du 17 mars 2020).

La Cour de cassation a admis que le comité social et économique (CSE) puisse être consulté par téléphone sur le reclassement d’un salarié inapte (Cass. soc., 26 oct. 2020, no 19-13.122).

Benjamin Louzier
Avocat Associé