CORONAVIRUS : COMMENT METTRE EN PLACE LE TÉLÉTRAVAIL ?

A l’heure où la pneumonie virale dénommée « Covi-19 » par l’OMS se propage dans le monde, de nombreuses entreprises françaises sont désormais sévèrement impactées, en particulier depuis que l’Italie est devenue l’un des principaux foyers de l’épidémie dans le monde.

Le Gouvernement Français semble avoir pris la mesure de la situation et adresse un certain nombre de recommandations, notamment sur le site internet www.gouvernement.fr/info-coronavirus.

En particulier, le Ministère des Solidarités et de la Santé recommande, dans la mesure du possible, de privilégier le télétravail dans les 14 jours suivant le retour de voyage pour les salariés « revenant de Chine (Chine continentale, Hong Kong, Macao), de Singapour, de Corée du Sud, d’Iran ou des régions de Lombardie et de Vénétie en Italie ».

De nombreuses entreprises ont d’ores et déjà mis en œuvre ces préconisations (Orange, BNP Paribas, Société Générale etc…).

Les employeurs s’interrogent sur les mesures à mettre en place, en particulier au regard de l’obligation légale de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » (article L. 4121-1 du Code du travail).

L’occasion de rappeler comment mettre en place le télétravail dans ces circonstances exceptionnelles.

Face à des circonstances exceptionnelles, le télétravail peut-il être mis en place dans l’entreprise ?

Le télétravail revêt en principe un caractère volontaire pour le salarié et pour l’employeur.

Le Code du travail prévoit cependant une exception au caractère volontaire du télétravail, à l’article L. 1222-11 : « En cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés ».

Cette disposition du Code du travail, introduite en 2012 suite à la pandémie de grippe H1N1, neutralise le droit de refus du salarié en offrant à l’employeur la possibilité d’imposer au salarié le passage en télétravail pour une période temporaire, permettant ainsi à l’entreprise de prendre les mesures nécessaires pour garantir la santé et la sécurité au travail de ses salariés.

L’épidémie actuelle constitue à l’évidence l’une des « circonstances exceptionnelles » visées par la loi.

Il appartiendra à l’employeur d’apprécier au cas par cas, la nécessité ou non d’imposer le télétravail à l’un ou plusieurs de ses salariés, en tenant compte notamment de l’évolution de la menace dans son entreprise et de la situation individuelle de chaque salarié (exposition au coronavirus suite à un voyage ou près d’une personne porteuse du virus, état de santé du salarié, âge du salarié etc.).

L’employeur pourra également tenir compte des alertes gouvernementales telles que celles émises par le ministère de la santé ou celui du travail.

Comment procéder en pratique ?

Il convient tout d’abord de vérifier les éventuelles dispositions prévues par un accord collectif ou une Charte sur le télétravail qui seraient d’ores et déjà en vigueur dans l’entreprise.

En l’absence d’accord collectif ou de charte « télétravail » déjà en vigueur dans l’entreprise, nous préconisons idéalement la rédaction d’un avenant temporaire au contrat de travail auquel seront précisées les conditions de travail pendant le télétravail : devront notamment être prévus la durée de l’aménagement temporaire des conditions de travail, le lieu du télétravail (ici en principe le domicile), les plages horaires durant lesquelles l’employeur peut joindre le salarié, les obligations du salarié et de l’employeur, les modalités de contrôle du tempsde travail ou de régulation de la charge de travail.

En cas d’impossibilité d’établir un avenant au contrat ou de refus du salarié de signer l’avenant proposé, il conviendra de l’informer par tout moyen des modalités de l’aménagement de son poste, au besoin par remise en main propre contre signature ou envoi par lettre recommandée avec accusé de réception.

Si le salarié ne peut s’opposer à un aménagement de son poste de travail que l’employeur considère comme nécessaire à la continuité de l’activité de l’entreprise et à la protection des salariés, l’employeur n’est en revanche pas tenu de répondre positivement à une demande de télétravail d’un salarié, sous réserve de justifier des raisons de son refus.

Un avocat spécialisé en droit du travail pourra utilement vous accompagner dans cette mise en place.

Une solution ponctuelle et efficace, limitée néanmoins aux missions pouvant être exercées en télétravail

Le recours au télétravail, de manière temporaire, peut être une solution ponctuelle et efficace pour garantir la protection des salariés tout en permettant la continuité et le fonctionnement de l’entreprise.

Cette solution n’est malheureusement pas adaptée à toutes les situations, certains salariés étant affectés à des fonctions qui par nature ne peuvent être exercées en télétravail ou ne disposant pas des outils ou installations suffisantes à domicile (ordinateur portable, accès internet etc…).

Pour ces salariés, qui ont été exposés au coronavirus et qui se trouvent dans l’impossibilité de travailler en raison d’une mise en quarantaine, reste alors la faculté de se tourner vers l’Agence régionale de santé (ARS) afin de pouvoir bénéficier du régime dérogatoire, instauré par le décret n°2020-73 du 31 janvier 2020, permettant de bénéficier sans condition et sans délai de carence des indemnités journalières de la sécurité sociale pendant une durée maximale de 20 jours.

Laurent BABIN, Avocat Associé et Diane REYNAUD, Avocat