Absence de mise en place du CSE au 1er janvier 2020 : quels sont les risques et les sanctions ?

La mise en place du comité social et économique (CSE) est obligatoire au plus tard le 31 décembre 2019 dans les entreprises dont l’effectif atteint au moins 11 salariés pendant 12 mois consécutifs au plus tard le 31 décembre 2019. 

L’absence de mise en place du CSE après le 1er janvier 2020 pourrait notamment résulter de :

  • l’absence de mise en œuvre, par l’employeur, des élections du CSE conformément à ses obligations ;
  • le constat, par un procès-verbal de carence établi par l’employeur, de l’absence de mise en place du CSE ;
  • l’annulation des élections du CSE à la suite d’une contestation.
  • Quelles sanctions en l’absence de mise en place du CSE au 1er janvier 2020 ?

L’absence de mise en place du CSE est envisagée par le législateur comme susceptible de sanctions. L’entrave à la constitution du CSE ou à la libre désignation de ses membres est ainsi puni d’un emprisonnement d’un an et d’une amende de 7 500 €.

Tout salarié pourra également réclamer l’allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’absence de représentation du personnel. L’employeur commet une faute causant nécessairement un préjudice aux salariés, privés d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts, lorsqu’il n’accomplit pas les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel et en l’absence d’établissement d’un procès-verbal de carence.

Dans le même sens, une organisation syndicale ayant sollicité l’organisation des élections pourra également voir l’employeur condamné à lui verser des dommages-intérêts en raison de la faute commise du fait de l’absence d’organisation des élections.

Au-delà des sanctions légales fixées par le Code du travail, l’absence de CSE aura également des conséquences en particulier lorsque des informations-consultations sont obligatoires, notamment :

  • le licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle ou non professionnelle : l’employeur est tenu de consulter le CSE sur l’obligation de reclassement et la recherche des postes proposés au salarié en adéquation avec les préconisations du médecin du travail. L’absence de respect de cette obligation rend le licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse ;
  • le licenciement collectif pour motif économique : l’employeur doit informer, consulter voire négocier avec le CSE. Toute procédure de licenciement pour motif économique dans une entreprise où le CSE n’a pas constitué alors qu’elle est assujettie à cette obligation et qu’aucun procès-verbal de carence n’a été établi est irrégulière;
  • la dénonciation d’un usage : afin de dénoncer valablement un usage, l’employeur doit informer individuellement les salariés ainsi que les institutions représentatives du personnel. Lorsqu’il n’informe pas le CSE, la décision de dénonciation n’est pas opposable aux salariés malgré leur information individuelle. En l’absence de CSE et donc d’information de la dénonciation d’un usage, cette décision ne sera pas opposable aux salariés ;
  • la mise en place ou l’opposabilité d’un règlement intérieur : Le règlement intérieur ne peut être introduit ou modifié qu’après avoir été soumis à l’avis du CSE. Une entreprise qui dispose d’un règlement intérieur seulement soumis à la consultation du CE et non à celle du CSE ne pourra dès lors lui apporter aucune modification ;
  • la mise en place de l’intéressement au sein de l’entreprise : la possibilité d’instituer une mesure d’intéressement au sein de l’entreprise est accordée à « toute entreprise qui satisfait aux obligations incombant à l’employeur en matière de représentation du personnel » . Outre le fait qu’en l’absence de CSE la société ne pourrait valablement conclure un accord d’intéressement avec les représentants d’organisations syndicales représentatives dans l’entreprise ou au sein du CSE, elle ne pourra également pas utiliser la voie de la ratification à la majorité des deux tiers offerte par le législateur.
  • Que faire en cas de procès-verbal de carence de mise en place du CSE obtenu avant le 31 décembre 2019 ?

Le procès-verbal (de carence) établit au titre des élections tenues avant le 31 décembre 2019 permettra de démontrer que l’employeur a rempli ses obligations en matière de représentation du personnel.

Il existe cependant une incertitude concernant les entreprises ayant établi un procès-verbal de carence au titre des dernières élections du comité d’entreprise (donc avant le 31 décembre 2019).

La durée du procès-verbal de carence est calquée sur la durée du mandat de l’institution représentative du personnel concernée : 4 ans, sauf durée inférieure prévue par accord.

Un procès-verbal de carence établi le 31 mars 2017 devait donc avoir pour terme le 31 mars 2021. L’article 9 de l’ordonnance no 2017-1386 du 22 septembre 2017 semble pourtant viser uniquement le terme des mandats en cours et non l’hypothèse d’un procès-verbal de carence établi au titre des dernières élections, puisqu’il énonce que « Le comité social et économique est mis en place au terme du mandat des délégués du personnel ou des membres élus du comité d’entreprise, de la délégation unique du personnel, de l’instance regroupée mise en place par accord du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, lors du renouvellement de l’une de ces institutions, et au plus tard le 31 décembre 2019 ».

Une entreprise qui dispose d’un procès-verbal de carence établit dans ces circonstances serait-elle libérée de l’échéance du 31 décembre 2019 ? Dans ce cas précis, l’ensemble des procédures qui nécessitent la consultation du CSE et dont l’entreprise serait libérée, compte tenu du procès-verbal de carence établi, seront-elles jugées valables ? Un employeur pourra-t-il valablement notifier à un salarié un licenciement pour motif économique ou pour inaptitude ?

Il n’existe à ce jour aucune disposition ni précision qui permettrait de se prononcer de façon certaine. Il est donc évidemment recommandé aux entreprises de respecter l’échéance du 31 décembre 2019 lorsqu’elles disposent d’un procès-verbal de carence antérieur même si le doute subsiste.

Benjamin Louzier
Avocat Associé
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