BSA accordés aux dirigeants : attention au risque de redressement par l’URSSAF – comment se défendre ?

Dans un arrêt important (Cass. 2ème civ., 4 avr. 2019, pourvoi no 17-24.470, arrêt no 472 P+B+R+I) la Cour de cassation définit les conditions dans lesquelles un bon de souscription d’achat (BSA) peut constituer un avantage soumis à cotisations.

Les faits :

Souhaitant mettre en place un mécanisme d’intéressement à ses dirigeants, une société leur a proposé des BSA.

Dans la convention passée entre l’entreprise et la société de détention d’actions appartenant au même groupe, il est stipulé que les bons ne peuvent être « exercés » qu’à partir de la réalisation de certains évènements et qu’ils sont jusque-là incessibles, sauf en cas de départ de l’entreprise, circonstance entraînant l’obligation de revendre leurs BSA à la société qui les a émis. Ces évènements s’étant réalisés, les dirigeants cèdent leurs bons et réalisent une grosse plus-value.

À la suite d’un contrôle, l’Urssaf réintègre cette plus-value dans l’assiette des cotisations, en rappelant que tout avantage accordé aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail et acquis par ceux-ci à des conditions préférentielles est assujetti aux charges sociales.

L’entreprise avance plusieurs arguments pour de défendre.

Elle souligne que les BSA sont susceptibles de générer des profits comme des pertes en fonction de l’évolution à la hausse ou à la baisse des actions auxquelles ils se rattachent. Il n’y a donc pas d’avantage certain.

Autre argument, ces bons n’ont pas été octroyés mais vendus aux intéressés à un prix comparable à celui qui aurait été demandé à un investisseur extérieur. Il n’y a donc pas de tarif préférentiel.

La décision :

Ni la cour d’appel ni la Cour de cassation ne suivront l’employeur.

En effet, les six bénéficiaires se sont vu attribuer les BSA en considération de leur appartenance à la société, à telle enseigne qu’ils se sont engagés à les revendre en cas de départ et que ces bons sont incessibles à des tiers. Le lien avec le travail est donc avéré.

Et que penser de la thèse selon laquelle les bons ne constituent pas un avantage en raison du caractère aléatoire de la plus-value ? Cet argument ne tient pas à partir du moment où les BSA n’ont été délivrés qu’aux seuls dirigeants de l’entreprise, donc dans des conditions préférentielles.

Les juges ont donc validé le redressement.

Conclusions :

En cas de situation similaire, l’entreprise a intérêt à avancer des arguments différents :

La Cour fonde tout d’abord sa décision sur le fait que l’attribution à un nombre réduit de personnes du droit de souscrire aux BSA constitue en soi un avantage.

Or, la question qui devrait se poser, et qui n’a pas été tranchée, est de savoir si la souscription a été réalisée à des conditions de marché ou à des conditions préférentielles. Si les BSA ont été payés à leur juste valeur, aucun avantage financier particulier ne devrait pouvoir être caractérisé, et ce même si la souscription a été limitée à un cercle restreint de personnes.

Par ailleurs, à supposer même que l’investissement ait été réalisé à des conditions préférentielles, il devrait être possible de soutenir que l’avantage se matérialise à la date de l’investissement et non, comme l’a jugé la Cour, à la date de cession des titres. Dès lors, les sommes soumises à cotisations sociales correspondraient à l’insuffisance de prix acquitté par le manager et non à la plus-value réalisée.

 

Benjamin Louzier
Avocat Associé