DECRET N°2020-325 DU 25 MARS 2020 RELATIF A L’ACTIVITE PARTIELLE : LA CONSULATION DU CSE OBLIGATOIRE DANS TOUTES LES ENTREPRISES QUEL QUE SOIT LEUR EFFECTIF ?

Le décret relatif à l’activité partielle vient de paraître ce 26 mars 2020 au JORF. 

Afin de limiter les conséquences d’une baisse d’activité, liée à l’épidémie de Covid-19, le Gouvernement a pris de nouvelles mesures, dans le cadre du décret n°2020-325 du 25 mars 2020, modifiant le dispositif d’activité partielle pour en faciliter l’accès aux entreprises.

L’obligation de consulter le Comité social et économique (CSE) pour avis sur la mise en place de l’activité partielle dans l’entreprise existait déjà pour les entreprises de plus de cinquante salariés.

Désormais, compte tenu de la rédaction nouvelle du Code du travail (R 5122-2 du CT), le décret étend cette obligation à toutes les entreprises dotées d’un CSE.

Bien évidemment, si l’entreprise a un effectif d’au moins 11 salariés (atteint pendant au moins 12 mois consécutifs) et a bien organisé des élections aux fins de mise en place du CSE, mais qu’il n’y pas eu de candidat lors des élections, il n’y a pas de difficulté, pour peu qu’un procès-verbal de carence ait été régulièrement dressé et la procédure électorale respectée : l’entreprise sera alors en mesure de joindre ce PV de carence au dossier de demande d’activité partielle.

Quels étaient les textes applicables jusqu’au 25 mars 2020 ?

Le 6ème alinéa de l’article R. 5122-2 du Code du travail disposait qu’ « elle (la demande préalable d’autorisation d’activité partielle) est accompagnée de l’avis préalable du comité social et économique en application de l’article L. 2312-17 ».

Or l’article 2312-17 du Code du travail figure au sein de la Section 3 relatives aux « attributions du CSE dans les entreprises d’au moins cinquante salariés ».

En opérant un tel renvoi, il était d’usage de considérer que l’avis préalable du CSE était obligatoire seulement pour les entreprises de plus de 50 salariés, même s’il pouvait être opportun de recueillir cet avis également en deçà de ce seuil.

Ainsi le site du service public, dans sa version actualisée au 13 août 2019 mentionnait-il une consultation du CSE obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés.

Comment la consultation du CSE est-elle devenue obligatoire pour tous les entreprises dotée d’un CSE ?

Le décret du 25 mars modifie l’alinéa 6 de l’article R.5122-2 du Code du travail et supprime le renvoi à l’article L.2312-17 du Code du travail.

Le sixième alinéa de l’article R.5122-2 est remplacé par les dispositions suivantes : « Elle (la demande d’autorisation d’activité partielle) est accompagnée de l’avis préalablement rendu par le comité social et économique, si l’entreprise en est dotée. Par dérogation, dans les cas prévus au 3° ou au 5° de l’article R. 5122-1, cet avis peut être recueilli postérieurement à la demande mentionnée au premier alinéa, et transmis dans un délai d’au plus deux mois à compter de cette demande ».  

La nouvelle rédaction de ce sixième alinéa par le décret du 25 mars 2020 supprime le renvoi à l’article L.2312-17 du Code du travail, relatif aux attributions du CSE dans les entreprises de plus de 50 salariés.

La suppression de ce renvoi ainsi que la précision apportée par le texte « le comité social et économique, si l’entreprise en est dotée » conduit à considérer que désormais, toutes les entreprises tenues d’avoir un CSE, y compris celles dont l’effectif est inférieur à 50 salariés, devront consulter pour avis leur CSE, cet avis constituant l’une des pièces exigées pour le dossier de demande d’activité partielle (R.5122-2 CT).

Quelles préconisations ?

En l’état du texte en vigueur, nous préconisons donc à toutes les entreprises d’au moins 11 salariés dotées d’un CSE de consulter pour avis le CSE sur la mesure d’activité partielle, afin d’éviter le risque que leur demande soit purement et simplement rejetée par l’administration en raison de l’incomplétude du dossier.

On prendra soin d’informer le CSE, pour recueillir valablement son avis, sur les conditions essentielles de la mesure envisagée, a minima 1° Les motifs justifiant le recours à l’activité partielle ; 2° La période prévisible de sous-activité ; 3° Le nombre de salariés concernés.

Certes, on peut regretter le choix de cette période des plus délicates pour ajouter une contrainte nouvelle sur les entreprises de moins de 50 salariés contraintes de solliciter une mesure d’activité partielle, alors même que l’objectif affiché par le Décret est d’alléger les contraintes …

Pour autant, dans les entreprises de moins de 50 salariés, le CSE a bien désormais les attributions qui étaient celles des délégués du personnel jusqu’au 31 décembre 2019, parmi lesquelles les sujets relatifs à la durée du travail dans l’entreprise. Consulter le CSE y compris dans les entreprises de moins des 50 salariés est donc tout à fait cohérent.

Une lecture littérale de l’article R 5122-2 nouveau du CT « si l’entreprise en est dotée » pourrait conduire à considérer a contrario que si une entreprise n’est pas dotée d’un CSE, elle n’est pas tenue de communiquer l’avis (ce qu’elle pas en mesure de faire, ne pouvant consulter un CSE … inexistant).

Le cas de figure – non théorique à l’évidence – est celui d’une entreprise qui n’aurait pas organisé d’élections en vue de la mise en place d’un comité social et économique avant le 1er janvier 2020, alors même qu’elle était tenue de le faire, compte tenu de son effectif. Pourra-t-elle soutenir que sa demande au titre de l’activité partielle doit être acceptée, sans communication de l’avis du CSE, nonobstant le délit d’entrave encouru ? Nous pensons qu’une certaine tolérance de l’Administration en cette période exceptionnelle serait appréciable. Pour autant, il n’est pas évident que cette interprétation -qui peut être défendue- résiste sur le terrain judiciaire dans le cadre d’un recours en annulation contre la décision administrative de rejet.

Sauf bien sûr à pouvoir justifier que l’entreprise n’était pas encore soumise à l’obligation d’organiser des élections aux fins de mise en place d’un CSE avant la crise « Covid-19 » (n’ayant pas atteint le seuil de 11 salariés sur une période d’au moins 12 mois), notre recommandation sera de procéder à la mise en place d’un CSE  et de recueillir son avis avant l’expiration du délai de 2 mois ci-après expliqué (sous réserve que la mise en place du CSE soit réalisable en pratique en fonction de la durée du confinement et de la date de la demande d’activité partielle, compte tenu des délais « incompressibles » pour les élections).

Dans quelles délais l’avis du CSE doit-il être transmis à l’administration ?

Le nouveau décret, compte tenu des circonstances, accorde à l’employeur la possibilité de recueillir l’avis du CSE a posteriori.

Si à la date de la demande, l’avis du CSE n’a pas encore été recueilli quant à la mise en place de l’activité partielle, le décret du 25 mars 2020 permet désormais de recueillir l’avis du CSE a posteriori, sous réserve que cet avis soit adressé à l’administration pour compléter le dossier dans un délai de 2 mois à compter la demande d’activité partielle.

Nous ne pouvons que recommander aux entreprises d’être particulièrement vigilantes quant au respect de ce délai.

D’autres questions pratiques sur les conditions et la mise en œuvre de l’activité partielle ? N’hésitez pas à téléchargernotre fiche pratique que nous actualisons ici , ainsi que le blog Redlink Avocats.

Laurent Babin
Avocat Associé

Diane Reynaud
Avocate

Redlink Nouvelle Aquitaine